Lundi 18 avril, à Mayotte, après plus de deux semaines de grève générale « pour l’égalité réelle », les barrages mis en place par l’intersyndicale (CGT, FO, CFDT, Solidaires, FSU et FAEN) aux principaux carrefours routiers, paralysant une bonne partie de l’activité de l’île, ont été levés. Il a fallu de longues heures de discussion, samedi après-midi, lors d’une assemblée générale qui s’est tenue au col de Chirongui, à une trentaine de kilomètres au sud de Mamoudzou, le chef-lieu du département, pour que les responsables syndicaux de retour de Paris, où ils avaient été reçus, la veille, au ministère des outre-mer, parviennent à convaincre leur base de « suspendre » la grève.

Les représentants de l’intersyndicale étaient conscients que, dans le climat d’extrême tension que connaît Mayotte, la poursuite du mouvement pouvait rapidement déraper. Les habitants de l’île ont encore en mémoire le souvenir de la grève de 2011, qui avait duré quarante-quatre jours et entraîné une pénurie générale.

Les manifestations d’exaspération, exacerbées par les violences commises en début de semaine dernière par des bandes de jeunes désœuvrés, faisaient craindre que la situation ne dégénère. « Si le gouvernement ne fait pas un geste, on va vers la guerre civile, confiait le négociateur de la FSU, Thierry Wuillez. Si le mouvement continue, il devient incontrôlable. Ils risquent de mettre le feu à l’île. »

« Nous avons mis le pied dans la porte »

Les gestes consentis par le gouvernement, même s’ils ne satisfont pas immédiatement toutes les revendications, sont réels. Le premier concerne l’application, à Mayotte, du code du travail de droit commun : elle devrait être inscrite dans la loi pour entrer en vigueur au 1er janvier 2018. Le gouvernement s’engage également à ce que les conventions collectives de la métropole s’appliquent automatiquement et intégralement à Mayotte, et que ce soit inscrit dans la loi.

Un autre point majeur concernait la reconstitution des carrières des agents travaillant dans la fonction publique avant la départementalisation. Jusque-là, le gouvernement avait posé un verrou : il ne consentait à examiner les situations antérieures que jusqu’à 2009. Il a accepté de rouvrir des discussions à partir du mois de mai pour les années antérieures à 2009, sans pour autant dire jusqu’où il pensait pouvoir aller.

En tout cas, aux yeux de l’intersyndicale, « le verrou de 2009 a sauté, nous avons mis le pied dans la porte ». Des négociations vont commencer en mai. Les syndicalistes ont prévenu que, si les engagements n’étaient pas tenus, le mouvement reprendrait.