Bien sûr, il est « facile de sous-estimer à quel point le monde peut changer en dix ans », reconnaît Mark Zuckerberg. Mais le patron de Facebook s’est cependant prêté à un exercice de science-fiction mesuré, ce mardi, en décrivant comment il voyait les dix prochaines années de son entreprise.

Dans le monde du futur vu par M. Zuckerberg, il y a, bien sûr, encore plus de personnes connectées à Facebook, d’une manière ou d’une autre – « et pas uniquement le tiers des habitants de la planète qui vivent dans les pays les plus riches », une référence au projet Free Basics de l’entreprise, qui propose un accès limité au Web dans les zones mal couvertes et qui a connu quelques déboires cette année. Il y aura aussi plus de vidéos, plus de réalité virtuelle – accessible par des lunettes « qui ressembleront beaucoup aux lunettes de vue d’aujourd’hui », prédit M. Zuckerberg, photo à l’appui, et qui ouvriront la voie à « une toute nouvelle gamme d’interactions sociales ».

Et, surtout, plus d’intelligences artificielles, dans tous les domaines, pour effectuer des tâches complexes. A terme, « n’importe quel docteur, dans le monde entier, pourra faire analyser [par une intelligence artificielle] une radiographie et déterminer mieux que jamais s’il s’agit d’un cancer. Ces progrès sauveront des vies ! » Et les technologies utiles dans le domaine médical auront beaucoup de points communs avec celles utilisées dans le domaine des interactions sociales, et notamment le deep learning, ce procédé qui permet à un programme d’apprendre à la manière d’un humain, juge le patron de Facebook.

Pour le futur proche, justement, les intelligences artificielles devraient avant tout envahir Messenger, l’application de discussion instantanée de Facebook. L’entreprise ouvre en effet aux développeurs la possibilité de construire leurs propres « chatbots » – des programmes conversationnels, dotés d’une forme (encore limitée) d’intelligence. Démonstration avec le projet élaboré par la chaîne américaine CNN : un chatbot qui vous envoie les principaux titres de l’actualité, peut répondre à quelques questions, et apprend à mieux distinguer les sujets qui vous intéressent au fil du temps.

Messages politiques

Devant une audience largement composée de développeurs, M. Zuckerberg a aussi profité de l’ouverture de cette conférence annuelle pour détailler, en préalable, plusieurs convictions personnelles. « Notre mission, c’est de connecter chaque personne », a-t-il dit, « de donner une voix à tous, de soutenir le libre échange d’idées et de cultures entre les nations. Internet nous a permis de partager plus d’idées qu’à aucun autre moment dans l’histoire de l’humanité ».

Mais le fondateur de Facebook, qui s’est rendu à plusieurs reprises à l’étranger ces dernières semaines, notamment en Allemagne et en Chine, dit avoir noté une tendance au renfermement. « J’entends des voix apeurées qui appellent à construire des murs, à limiter la liberté d’expression, à ralentir l’immigration, et même à couper l’accès à Internet », a-t-il dit, dans une référence à peine voilée au candidat républicain à l’investiture Donald Trump, qui souhaite limiter l’immigration et a évoqué l’idée de construire un mur à la frontière mexicaine. « Il faut du courage pour choisir l’espoir plutôt que la peur. Il faut être optimiste pour penser que l’on peut changer le monde. »

Reste que l’un des objectifs les plus ambitieux portés par M. Zuckerberg ce mardi, construire, d’ici dix ans, « la technologie permettant de partager n’importe quoi avec n’importe qui » partout sur la planète, nécessitera un peu plus que le simple optimisme. En février, l’Inde a finalement mis un coup d’arrêt au déploiement du projet Free Basics de Facebook dans le pays, le jugeant contraire aux lois sur la concurrence.