Le leader du PSOE, Pedro Sanchez, le 12 février 2016 à Madrid. | GERARD JULIEN / AFP

L’Espagne semble se diriger vers de nouvelles élections. Mercredi 24 février, Podemos a rompu les négociations avec le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) pour tenter de former un gouvernement. En cause : la signature, plus tôt dans la matinée, d’un pacte « d’investiture et de gouvernement » entre le PSOE et le parti libéral Ciudadanos.

Plus de deux mois après les élections législatives du 20 décembre, aucun accord permettant la formation d’un gouvernement ne semble en vue en Espagne. L’accord signé entre le PSOE, arrivé en deuxième position avec 22 % des voix (90 députés sur 350), et Ciudadanos (15 %, 40 députés) n’est pas suffisant pour permettre l’investiture du secrétaire général socialiste, Pedro Sanchez. Avec 130 voix, les deux formations ont besoin de l’abstention du Parti populaire (PP, droite) ou de Podemos pour gouverner.

Or le PP, arrivé en tête le 20 décembre avec 27,8 % des voix et 123 députés, mais incapable de trouver des alliés au Parlement, a prévenu qu’il ne soutiendrait en aucun cas un gouvernement qu’il ne préside pas. Quant à Podemos, il considère que « le choix du PSOE » de s’allier avec Ciudadanos est « incompatible » avec lui. Cet accord « conduit à l’échec de l’investiture », a tranché le numéro deux de Podemos, Iñigo Errejon.

« Main tendue »

Il paraît impossible pour le PSOE de gagner le premier vote d’investiture, prévu le 2 mars, qui requiert une majorité absolue des 350 députés au Parlement, mais aussi le second, le 5 mars, pour lequel une majorité simple (qui permet de tenir compte des abstentions) est suffisante. Podemos n’exclut pas toutefois une reprise des négociations après le 5 mars. Le Parlement a deux mois à partir du premier vote pour élire le président du gouvernement. Passé ce délai, de nouvelles élections seraient convoquées pour le 26 juin.

La possibilité pour le PSOE de parvenir à un accord dans un avenir proche avec Podemos semble cependant limitée. En réclamant la vice-présidence du gouvernement et un certain nombre de ministères, avant même de commencer les négociations, et en adoptant un ton condescendant, voire méprisant, à l’égard de Pedro Sanchez, le chef de file de Podemos, Pablo Iglesias, a irrité les dirigeants socialistes.

Certains points de l’accord entre le PSOE et Ciudadanos auraient pu être soutenus par Podemos, comme l’introduction d’un revenu minimum vital, l’abrogation de certains points de la réforme du travail du PP, les mesures de lutte contre la corruption ou la suppression des bonifications qui permettent aux multinationales de ne payer que 6 % d’impôts (au lieu de 25 %). Mais le texte ne prévoit aucune hausse des impôts sur le revenu, indispensable pour financer l’augmentation des dépenses publiques que défend Podemos, et « s’oppose à toute tentative de convoquer un référendum ayant pour objectif d’impulser l’autodétermination de n’importe quel territoire d’Espagne ». Or Podemos défend la tenue d’un référendum sur l’indépendance en Catalogne.

Plus qu’un véritable accord de gouvernement – dont la mise en œuvre est quasi impossible dans l’actuelle configuration du Parlement –, ce pacte semble surtout l’occasion pour le PSOE et Ciudadanos d’apparaître comme des acteurs politiques ouverts au dialogue, afin de ne pas être tenus pour responsables si de nouvelles élections devaient être organisées.