Mario Draghi, à Francfort, le 21 avril. | Michael Probst / AP

La conférence de presse de Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne (BCE), qui a suivi, jeudi 21 avril à Francfort, la réunion du conseil des gouverneurs de l’institution monétaire, était très attendue.

C’était la première intervention publique de M. Draghi depuis la récente vague de critiques visant la politique de taux bas et de liquidités abondantes de la BCE. En Allemagne, notamment cette stratégie est accusée de spolier les épargnants et de mettre les banques en péril.

Le patron de la banque centrale s’est insurgé contre ces critiques et il a défendu l’indépendance de l’institution qu’il préside. Il a notamment rappelé que la BCE obéissait « à la loi, pas aux politiques ». « Nous avons pour mandat de chercher à atteindre la stabilité des prix pour toute la zone euro, pas seulement pour l’Allemagne, a-t-il ajouté. Nous sommes indépendants. »

Mode offensif

Et après avoir défendu sa position, le président de la banque centrale est passé en mode offensif. La politique européenne doit en faire « beaucoup plus » pour soutenir l’économie, et seconder les efforts de la BCE pour faire repartir la croissance et les prix dans la zone euro, a-t-il plaidé. Ses appels aux gouvernements européens à se mettre au travail sont fréquents, mais ont rarement cette force.

« Notre politique a été la seule, ces quatre dernières années, à soutenir la croissance » dans le bloc monétaire, a dit M. Draghi. Il lève un doigt accusateur vers les gouvernements de la zone euro, qui n’ont selon lui pas mis sur les rails les réformes structurelles indispensables.

Plus tôt, la BCE avait annoncé à l’issue de la tenue de son conseil des gouverneurs avoir laissé inchangés ses taux directeurs à des niveaux historiquement bas. Elle montre ainsi sa détermination dans la lutte qu’elle a engagée pour relancer la croissance de l’économie de la zone euro, y faciliter l’accès des ménages et des entreprises au crédit, mais aussi pour stimuler les prix dont la progression au sein de l’union monétaire reste en deçà de 2 %, la cible de la banque centrale (− 0,2 % en février).

Incertitudes à l’échelle mondiale

Lors de sa conférence de presse, M. Draghi a précisé que les taux d’intérêt de l’institution de Francfort « resteraient à leurs niveaux actuels, ou plus bas, pendant une période prolongée ».

Il a justifié cette politique en arguant que « les incertitudes à l’échelle mondiale persistaient ». « A l’avenir, il est essentiel de préserver un degré approprié d’accommodation monétaire, aussi longtemps que nécessaire », a-t-il encore déclaré.

Le 10 mars, la BCE avait dévoilé un arsenal de mesures pour soigner l’économie européenne. D’abord, elle avait baissé son principal taux directeur de 0,05 % à 0 %. En d’autres termes, le loyer de l’argent est désormais nul.

De même, le taux de prêt marginal était passé de 0,30 % à 0,25 %. Ce dernier s’applique quand une banque a besoin de liquidités mais dans le cadre de prêts qui doivent être remboursés le jour suivant.

La BCE avait aussi annoncé un recalibrage de son programme de rachat de dettes publiques – l’assouplissement quantitatif (quantitative easing). Lancé en mars 2015, il consistait en le rachat de 60 milliards d’euros mensuels de titres de dettes, essentiellement publics. Désormais, ce montant atteint 80 milliards d’euros par mois.

Et ils seront élargis à d’autres types d’actifs, à savoir des obligations d’entreprises de bonne qualité, c’est-à-dire les mieux notées par les agences de notation. « En juin, nous conduirons la première de notre série de quatre opérations de refinancement à plus long terme ciblées. Et nous commencerons les achats dans le cadre de notre programme pour le marché des obligations d’entreprises », a précisé M. Draghi.