Agnès Saal, à son arrivée au tribunal de Créteil, le 11 avril. | LIONEL BONAVENTURE / AFP

Agnès Saal a été condamnée lundi 11 avril à payer 4 500 euros d’amende dans l’affaire des frais de taxi à l’Institut national de l’audiovisuel (INA), ainsi que 5 500 euros au titre des dommages et intérêts et des frais de justice à l’association de lutte contre la corruption Anticor. C’est le début de l’épilogue judiciaire pour l’ancienne directrice de l’IINA et du Centre Georges-Pompidou, poursuivie dans deux dossiers distincts. Pour d’autres dépenses de taxi indues, dépassant plusieurs dizaines de milliers d’euros au Centre Pompidou, elle connaîtra vendredi la nature de sa condamnation.

« Je regrette qu’on ait maintenu deux procédures. Cela fait trois sanctions avec la mesure disciplinaire », a réagi Me Eric Morain, l’un des avocats de la fonctionnaire. Au début de janvier, le président François Hollande avait procédé par décret à son exclusion de la fonction publique pour deux ans, dont six mois ferme. Mme Saal, poursuivie pour détournement de fonds publics par personne chargée d’une mission de service public, un délit puni jusqu’à dix ans de prison, a fait le choix d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), le « plaider coupable » à la française.

Parcours sans faute

Cette énarque, réputée compétente et travailleuse, avait enchaîné les postes au Centre national du cinéma, à la Bibliothèque nationale de France et au Centre Pompidou, avant de prendre la tête de l’INA en 2014. Son parcours sans faute est stoppé net en avril 2015, quand un corbeau divulgue au conseil d’administration de l’INA les dépenses de la dirigeante : 40 000 euros de notes de taxi auprès de la compagnie G7 en moins de dix mois, dont 6 700 euros dépensés par son fils.

Les révélations déclenchent une tempête médiatique, et l’intéressée démissionne deux jours plus tard, à la demande de la ministre de la culture d’alors, Fleur Pellerin. Deux enquêtes sont alors ouvertes, aux parquets de Créteil et de Paris. Mme Saal a aussi laissé une ardoise de 38 000 euros de notes de taxi entre janvier 2013 et avril 2014 lorsqu’elle était directrice générale du Centre Pompidou.

« J’assume »

Des montants qui ont finalement été « divisés par deux environ » après enquête, a assuré Me Morain. Dans un entretien au Monde, en janvier, Mme Saal était revenue sur sa chute brutale :

« J’assume cette faute, je la regrette à un point infini, j’y pense jour et nuit depuis huit mois. Mon regret est sincère, profond. Certes, la sanction est d’une violence symbolique forte. Mais je sers l’Etat depuis trente-deux ans et, à ce titre, je respecte la décision des autorités qui l’incarnent. »

Après ces regrets, elle mettait toutefois en cause les procédures d’alerte :

« Il n’y a pas d’alerte. A aucun moment, on ne vient me dire : “Attention, les montants sont trop élevés, certaines courses semblent anormales…” Rien ne m’incite à rectifier ma pratique. Les processus de cadrage et d’alerte ne fonctionnent pas. (…) Je ne voyais pas moi-même le détail de mes courses, je n’y pensais même pas. Quand je montais dans le taxi, je ne regardais pas le compteur car je travaillais. Je regardais mes parapheurs, mon téléphone… J’aurais dû exercer un auto-contrôle. Je ne l’ai pas fait. »

« A travers moi, l’opinion et les réseaux sociaux se sont fait l’écho de la détestation de la haute fonction publique et de ses abus, supposés ou réels », affirmait également Mme Saal.