L’histoire commence en novembre 2015. Adrien Sergent, un jeune Marseillais de 22 ans, se lance dans la rédaction d’une pétition intitulée « Protégeons le vrai savon de Marseille » sur le site Change.org. Elle a pour objectif, selon son créateur, de défendre ce produit menacé par l’industrialisation et la perte de son identité.

Plus de 120 000 signataires

Le mois précédent, ­l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) lançait une enquête visant à établir les critères pour classer le savon de Marseille Indication géographique protégée (IGP). Adrien Sergent compte bien y faire inscrire les siens. « Des choses comme l’utilisation d’huile d’olive locale par exemple. » Rapidement, la machine s’emballe et en trois mois, le jeune homme remporte près de 100 000 soutiens. A ce jour, plus de 120 000 personnes ont signé.

Mais le succès de la pétition ne plaît pas à tout le monde. L’Association des fabricants de savons de Marseille (AFSM) décide de porter l’affaire devant la justice. Selon leur avocat, Me Tort, une première mouture du texte, aujourd’hui amendée, comportait des passages portant atteinte à l’image des entreprises de l’association. La pétition accusait notamment certains producteurs de « voler le consommateur », et considérait que leur activité « exerce une concurrence déloyale »

Un habitué des causes citoyennes

Autant d’expressions qui ne plaisent pas à cette association qui compte parmi ses douze adhérents de grosses structures comme la marque de cosmétiques L’Occitane en Provence ou le laboratoire BEA. « Ce qui nous gêne dans la pétition, ce sont certains propos diffamants », se désole Serge Bruna, producteur à la Savonnerie marseillaise de la Licorne et président de l’AFSM. « J’essaie de montrer mon point de vue citoyen. Et une certaine vision du savon de Marseille », se défend Adrien Sergent, qui comparaissait devant le tribunal de grande instance de Marseille lundi.

Adrien Sergent, autoentrepreneur, voit dans la pétition un "outil du XXIe siècle pour la démocratie". | Jean-Paul Pelissier/Le Figaro

Il faut dire que l’individu est un habitué des causes citoyennes. « Mon engagement pour le savon de Marseille date de 2012 », justifie-t-il. Cette année-là, il lance une autre pétition pour sauver la savonnerie du Fer à Cheval mise en redressement judiciaire. Elle a depuis trouvé repreneur. Jeune entrepreneur « dans le numérique », Adrien Sergent voit dans la pétition en ligne un « outil du XXIe siècle pour la démocratie ». C’est d’ailleurs encore une pétition, contre la réforme du régime des autoentrepreneurs cette fois, qui l’avait mené en 2013 devant la ministre de l’artisanat Sylvia Pinel.
Vendredi 22 avril, le juge des référés de Marseille a prononcé l’annulation de l’assignation du 15 avril délivrée à l’encontre d’Adrien Sergent.

Fabrication du savon de Marseille traditionnel à la savonnerie du Fer à cheval

Savonnerie du fer à cheval savon de marseille
Durée : 04:14

Lire aussi (édition abonnés) : Le savon de Marseille en guerre contre le faux et la concurrence

Valentin Ehkirch