Pour redevenir un modèle en vue, le nouveau Scénic de Renault a décidé de frapper un grand coup. Pas de moteur surpuissant ou super-écolo, de technologie révolutionnaire ou de design renversant. Le monospace de gabarit intermédiaire de la marque au losange a décidé de se doter en série d’énormes roues de 20 pouces. Le gabarit des grandes berlines et des SUV (faux 4 × 4 urbains) les plus imposants. Ce choix dévoilé lors du Salon de Genève, début mars, a été salué jusque dans les rangs de la concurrence, mais il n’a pas réellement surpris. Hisser ses voitures sur de grandes roues est devenu plus qu’un must  : un exercice imposé.

Le Scénic de Renault, présenté au Salon de Genève début mars. | PASCAL BONNIERE / PHOTOPQR/VOIX DU NORD

A en croire les designers de Renault, tout est affaire de proportions. « De grandes roues permettent de mieux asseoir la voiture au sol. Cela donne une sensation de stabilité, de robustesse. Un caractère statutaire qui la valorise. Une voiture avec de petites roues n’est pas très attirante et pas davantage rassurante », estime Jérémie Sommer, qui a dessiné le Scénic. En quinze ans, la norme est passée de 15 pouces à 17 pouces. Ce qui représente tout de même un peu plus de 5 centimètres. Appartenant à la catégorie, en perte de prestige, des monospaces, le Scénic doit retrouver sa capacité à flatter l’amour-propre de son propriétaire.

Les modèles se donnent des grands airs

Pour y parvenir, le « gimmick » choisi par Renault n’est pas anodin. Cette esthétisation de la roue – qui, non contente de grimper en taille, se pare de jantes toujours plus travaillées, avec des teintes grises ou noires – ne serait qu’un juste retour des choses. Héritage du tuning des années 1990, la manie des grands diamètres a d’abord séduit les marques premium, qui ont usé de cet effet de style pour donner de grands airs à leurs modèles et affûter les sensations de conduite, quitte à dégrader le confort. Un exemple parmi d’autres  : l’ancienne Mini Clubman chaussée de 17 pouces est un régal à manier sur la route, mais, avec ses pneus taille basse (de faible épaisseur), sa suspension est sèche comme un coup de trique.

Version sport, la tendance aux roues XXL se retrouve sur l'Opel GT concept. | MARTIAL TREZZINI / EPA

Ce n’est que récemment que les constructeurs généralistes ont sauté le pas et ont usé du même stratagème. « Pendant des années, les véhicules n’ont cessé de croître en gabarit, mais la dimension des roues n’a pas suivi, d’où un certain déséquilibre. On peut parler d’un effet de rattrapage », considère Alexandre Malval, le responsable du style chez Citroën. Cette harmonie retrouvée tiendrait en un nombre d’or  : entre la hauteur du pneu et celle du véhicule, le rapport devrait être de 1 à 2, ce qui ne va pas sans imposer quelques contraintes. Augmenter d’un pouce le diamètre coûte cher. Les grandes roues imposent de renforcer les trains roulants et tendent, toutes choses égales par ailleurs, à tirer la consommation vers le haut.

Des pneus à l’aspect très soigné

« Pour résoudre l’équation, nous avons légèrement réduit la largeur des pneumatiques conçus pour le Renault Scénic, afin de réduire la surface de contact », précise Thierry Chiche, qui dirige la division des pneus de tourisme chez Michelin. « Il faut veiller à préserver un certain équilibre, poursuit-il. Des roues hautes et trop étroites rompent l’harmonie et n’inspirent plus confiance au client. » Les constructeurs s’efforcent aussi de ne pas trop grignoter la hauteur de flanc des gommes. « Nous n’installerons pas de pneus taille basse sur le Scénic, qui doit rester un véhicule confortable », précise Pascal Chatelain, spécialiste chez Renault du design des roues, des phares et des feux. Sans oublier que ces pneus exposent excessivement la jante au contact des trottoirs. Renault assure cependant que les pneus du nouveau Scénic ne seront pas plus chers et que leur surface de roulage, plus importante, devrait allonger leur durée de vie.

Le Salon de l’auto de Genève en douze modèles

La roue, devenue l’objet de toutes les attentions des designers – qui commencent souvent leurs ébauches en les dessinant – se doit désormais d’attirer l’œil. Ce qui n’a pas échappé aux manufacturiers, qui se sont mis, eux aussi, à soigner l’apparence de leurs pneus. Michelin vient de lancer une série « Premium Touch », dont les flancs ont reçu un marquage laser microscopique, qui leur donne un aspect mat très recherché. Au point, jurent ses concepteurs, « que l’on a envie de les toucher »…

Retrouvez l’actualité automobile sur Lemonde.fr/m-voiture