L'entrée du Grand Marché à Saint-Denis, dans lequel se trouve le TGM. | DEFENSE PATRIMOINE REUNION974'S BLOG

A Saint-Denis, sur l’île de La Réunion, le Centre dramatique de l’océan Indien est depuis quelques semaines en ébullition. Alors que le contrat de la directrice, Lolita Monga, arrive à son terme en décembre, la Ville de Saint-Denis souhaite profiter de ce renouvellement pour transférer le label « centre dramatique national » du Théâtre du Grand Marché vers un nouveau lieu, la Fabrik. Cette décision a entraîné un mouvement de contestation relayé sur les réseaux sociaux. Après une annonce faite par la mairie le 30 mars, un collectif s’est formé. « Sauv nout téat grand marché », composé de spectateurs et de professionnels de la scène, lutte pour le maintien du label dans la salle de spectacles où le centre dramatique est installé depuis 1998. La pétition, lancée par le collectif, compte aujourd’hui près de 1 500 signatures.

Pour René Louis Pestel, adjoint au maire de Saint-Denis et délégué à la culture et au patrimoine, il s’agit avant tout de « redynamiser un espace, la Fabrik, qui se trouve dans un territoire prioritaire, en touchant un public plus large ». Le choix de ce lieu est stratégique, puisque la Fabrik se situe à deux pas de la Cité des arts et du théâtre de Champ Fleuri, deux autres pôles culturels. Selon l’adjoint au maire, le Théâtre du Grand Marché ne permettait plus l’accueil du label car « il y a besoin de services complémentaires. Il manque notamment des bureaux et des ateliers pour les décors ». Pas question pour autant que le lieu ferme. « Nous souhaitons en faire un théâtre de ville, grand public, avec davantage de représentations », précise M. Pestel.

Manque de concertation

Ces arguments sont jugés trop faibles par « Sauv nout téat grand marché ». « C’est une proposition à moitié recevable, reproche Riaz Maleck, membre du collectif. Le Théâtre du Grand Marché a besoin de travaux, mais il n’est pas vétuste. » Concernant la volonté de la mairie d’en faire une salle de spectacles plus « populaire », il souligne que « des actions sont déjà menées dans les lieux défavorisés ». Autre point de tension, le manque de concertation de la part de la Ville. « Nous avons été mis au courant par voie de presse, il n’y a eu aucune transparence. Au cours des dernières réunions, il n’y a jamais eu de mention d’insatisfaction. » La mairie assure pourtant avoir lancé les discussions autour de ce sujet au mois de décembre 2015, lors d’un comité de pilotage qui réunissait les quatre partenaires du centre dramatique : la Ville, le Conseil régional, le Conseil départemental et l’Etat, représenté par la direction des affaires culturelles de l’océan Indien.

Le collectif redoute qu’à terme, le maintien du label, attribué par le ministère de la culture et de la communication, soit mis en péril

Le collectif voit également d’un mauvais œil le déménagement du label vers la Fabrik, à cause de sa proximité avec la Cité des arts, dirigée par la mairie de Saint-Denis. « Nous craignons que le label vienne alimenter un lieu de la Ville, explique Riaz Maleck. La Cité des arts risque d’absorber une grande partie de l’activité culturelle et d’entraîner un manque de diversité. » Par ailleurs, les membres du collectif ne jugent pas le choix de la Fabrik adapté. « C’est un lieu de fabrication, pas de diffusion », déplore Riaz Maleck. « Sauv nout téat grand marché » redoute qu’à terme, le cahier des charges de centre dramatique national ne soit pas respecté à la Fabrik et que le maintien du label, attribué par le ministère de la culture et de la communication, soit mis en péril.

Les partenaires du centre ont cependant réitéré leur intérêt à sa conservation à La Réunion, car il est le seul centre dramatique national hors de l’Hexagone. « Nous sommes en parfait accord là-dessus, confirme-t-on au ministère de la culture et de la communication. Dès lors que la Ville de Saint-Denis fait des propositions, nous sommes ouverts à la discussion ». La réflexion se poursuit pour trouver un terrain d’entente. Une réunion avec l’ensemble des partenaires devrait avoir lieu prochainement.

Hélène Capdeviole