Lutz Bachmann, fondateur de Pegida, lors de la manifestation hebdomadaire du mouvement islamophobe à Dresde, en Allemagne, le 18 avril. | ROBERT MICHAEL / AFP

Le fondateur du mouvement islamophobe allemand Pegida va de nouveau devoir faire face à la justice de son pays. Lutz Bachmann comparaît à partir du mardi 19 avril dans son fief de Dresde, dans la Saxe, pour avoir traité les réfugiés de « bétail », dans un contexte de forte poussée de l’extrême droite au niveau national.

Déjà condamné pour braquages, violences et trafic de cocaïne, détenu 14 mois en Allemagne après s’être enfui en Afrique du Sud, l’homme de 43 ans encourt cette fois trois mois à cinq ans de prison. Il sera jugé sur trois jours jusqu’au 10 mai, sous haute sécurité.

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La justice lui reproche des propos postés en septembre 2014 sur sa page Facebook, décrivant les « réfugiés de guerre » comme du « bétail » ou de la « racaille », soit une « incitation à la haine » et une « atteinte à la dignité » aux yeux de l’accusation.

Sursaut du mouvement islamophobe en pleine crise des migrants

Les « Patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident » (Pegida) avaient lancé leur mouvement à l’automne 2014 à Dresde, avec quelques centaines de personnes. Ils ont pris rapidement de l’ampleur avant de culminer après les attentats de Charlie Hebdo, en janvier 2015.

Mais le mouvement, après avoir tenté d’essaimer dans toute l’Allemagne et dans les pays voisins, avait subi un coup d’arrêt avec la publication par le journal Bild de photos de Lutz Bachmann grimé en Adolf Hitler puis l’implosion de sa direction, avec le départ des plus modérés.

Malgré un sursaut à l’automne dernier, porté par les inquiétudes suscitées par l’afflux record de demandeurs d’asile en Allemagne, Pegida n’a pas renoué avec ses sommets et reste principalement cantonné à son berceau dans la capitale de l’Etat régional de Saxe, en ex-RDA.

Lundi soir, lors du traditionnel rassemblement hebdomadaire de Pegida, au cœur de Dresde, M. Bachmann n’a fait aucune allusion au procès mais a ironisé sur l’émoi suscité ces derniers jours en Allemagne par la menace de poursuites contre l’humoriste Jan Böhmermann, pour un poème traitant le président turc Recep Tayyip Erdogan de zoophile et de pédophile.

« Imaginez le tollé (...) si ce poème était venu de moi ! On m’aurait arrêté directement devant la scène, placé en détention provisoire », et finalement « exécuté », a raillé Lutz Bachmann face à quelques milliers de manifestants venus réclamer l’expulsion des demandeurs d’asile et conspuer le gouvernement et la « presse mensongère ».

En quête de débouchés politiques, Pegida a multiplié les appels du pied – jusqu’ici en vain –au parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD), entré mi-mars dans trois nouveaux parlements régionaux. Avant la crise des réfugiés vivaient en Allemagne environ quatre millions de musulmans, majoritairement d’origine turque. En 2015, le pays a accueilli plus d’un million de demandeurs d’asile, principalement venus de pays musulmans.