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Le régulateur financier britannique a fini par réagir aux « Panama papers ». Quatre jours après le début des révélations, la Financial Conduct Authority (FCA) a écrit aux principales banques de la City pour leur demander de dévoiler leurs liens avec le cabinet Mossack Fonseca. Elle a envoyé une lettre à une vingtaine d’établissements, leur demandant d’ici au 15 avril de détailler sommairement leurs relations avec le cabinet juridique panaméen, ou avec des entreprises enregistrées auprès de celui-ci.

Ensuite, les banques devront poursuivre leur enquête interne plus en profondeur : « Au-delà du 15 avril, nous exigerons d’être tenu au courant de tout développement significatif ou de relations identifiées, et nous attendons une réponse complète, détaillant vos recherches, quand votre enquête sera conclue », ordonne la lettre dévoilée par le Financial Times.

La FCA précise « travailler avec de nombreuses autres agences » sur ce dossier. Elle rappelle aux banques leur devoir « d’avoir en place des systèmes limitant le risque » de blanchiment d’argent et la nécessité de connaître leurs clients et de vérifier l’origine de leurs fonds.

Parmi les dix banques qui ont le plus eu recours à Mossack Fonseca, on trouve en deuxième position l’établissement britannique HSBC. | JUSTIN TALLIS/AFP

La réaction de la FCA vient rappeler le rôle central de la City dans l’organisation des paradis fiscaux. Les données issues des « Panama papers » le prouvent. Parmi les dix banques qui ont le plus eu recours à Mossack Fonseca, on trouve en deuxième position l’établissement britannique HSBC, qui a demandé l’enregistrement de 1 511 entreprises offshore (à moitié depuis sa filiale suisse et à moitié depuis sa filiale monégasque). La banque privée britannique Coutts et Rothschild Trust, sise à Guernesey, font aussi partie de ce classement de tête.

Autre indication des « Panama papers » : Mossack Fonseca a travaillé avec 14 000 intermédiaires différents (banques, cabinets d’avocats, etc.) à travers le monde. Le pays où ceux-ci étaient le plus souvent enregistrés était Hongkong (2 212), suivi du Royaume-Uni (1 924) et de la Suisse (1 223).

Enfin, les paradis fiscaux situés dans le giron du Royaume-Uni ont également été utilisés en grand nombre par Mossack Fonseca. La moitié des entreprises enregistrées par le cabinet panaméen l’ont été dans les îles Vierges britanniques, ce qui en fait – de loin – sa juridiction préférée.

Ambiguïtés de David Cameron

Depuis trois ans, David Cameron a fait de la lutte contre l’évasion fiscale l’une de ses priorités affichées. Mais le premier ministre britannique est accusé d’hypocrisie. D’une part, les « Panama papers » ont révélé que son père – mort en 2010 – a longtemps été un client de Mossack Fonseca, et que son fonds d’investissement, Blairmore Holdings, ne payait pas d’impôts au Royaume-Uni.

D’autre part, si M. Cameron a effectivement agi au Royaume-Uni, il a peu fait pression sur les paradis fiscaux qui sont dans son giron (quatorze territoires d’outre-Mer – îles Caïmans, Bermudes, Anguilla, etc. – et trois dépendances de la Couronne – Jersey, Guernesey, île de Man). Contrairement à ses exigences, ceux-ci n’ont pas mis en place de registre identifiant les propriétaires ultimes des trusts et autres fondations, qui restent donc opaques. Officiellement, Londres le regrette mais affirme ne pas pouvoir faire grand-chose, ces îles étant formellement indépendantes.

Faux, réplique John McDonnell, l’un des leaders de l’opposition travailliste : « Il n’y a pas de raison que le Royaume-Uni ne puisse pas utiliser sa relation avec ces paradis fiscaux pour qu’ils arrêtent de traîner les pieds. » Ces territoires ont généralement une grande partie de leurs lois déposées au Parlement de Westminster et la reine doit ratifier leurs lois. Dans ces conditions, forcer les paradis fiscaux à coopérer devrait être possible.

Panama Papers : comprendre le système offshore en 3 minutes
Durée : 02:50