La Parisienne Laure Boulleau face à la Lyonnaise Elodie Thomis le 5 février 2016. | FRANCK FIFE / AFP

Deux clubs français sont encore engagés en Ligue des champions cette saison. Après les éliminations décevantes des joueurs lyonnais en phase de groupes en novembre 2015 et celle récente des joueurs parisiens en quart de finale, le football féminin défend encore les couleurs françaises. Les sections féminines de l’OL et du PSG s’affrontent en demi-finale de la Ligue des champions. Dimanche, les Lyonnaises ont l’avantage du terrain au Stade des Lumières à partir de 15 h. Le retour aura lieu au Parc des Princes le 1er mai.

Cette affiche est en passe de devenir un vrai rendez-vous puisque en plus des rencontres nationales, les deux équipes s’étaient déjà affrontées la saison dernière au stade des huitièmes de finale. Les Parisiennes avaient éliminé les Lyonnaises avant de s’incliner en finale face aux Allemandes de Francfort.

 > Lire Lyon-PSG : la guerre des dames

Meilleur club français avant l’émergence de l’OL et celle plus récente du PSG, le football club féminin de Juvisy est toujours l’un des bastions du football féminin : six fois champion de France entre 1992 et 2006, huit fois vice-champion dont en 2008, 2010 et 2012. Le club de l’Essonne a même connu la joie d’une demi-finale de Ligue des champions en 2013, éliminé par… l’Olympique lyonnais.

Laure Lepailleur, entraîneur adjointe de Juvisy et ancienne joueuse et formatrice de l’OL et du PSG, ainsi que l’internationale juvisienne Gaëtane Thiney aux 127 sélections, arbitrent pour Le Monde le duel franco-français.

  • Le projet féminin des deux clubs

Pour les deux Juvisiennes, la politique de l’OL en matière de football féminin paraît plus élaborée. « L’OL a un projet plus solide », lance Laure Lepailleur. Un avis étayé par Gaëtane Thiney pour qui les deux clubs ont « le mérite d’exister » : « Lyon a une approche plus ancienne. Jean-Michel Aulas a rapidement mis des ’billes’ dans le foot féminin et a construit un collectif bien huilé. Le PSG a mis des moyens importants plus récemment, plus encore qu’à Lyon, mais le projet se cherche encore une identité. Le club tente de rattraper Lyon sur l’expérience commune ».

Au niveau de la formation, l’avantage va une nouvelle fois à l’OL. Laure Lepailleur a été préparatrice physique des - 16 ans et entraîneur des - 13 ans de Lyon. Elle a également été responsable technique des jeunes au PSG en 2010 et en 2011. « À Paris, les jeunes joueuses ne sont pas forcément mises dans les meilleures conditions. Il y avait à mon époque un déficit de structures », livre-t-elle.

  • Le style de jeu

Là encore, à Juvisy, on met en avant le collectif plus abouti côté lyonnais. « Lyon a un jeu de possession qui use l’adversaire, un jeu de maîtrise collective. Le PSG a un jeu plus direct qui a plus tendance à se reposer sur certaines individualités », déclare Gaëtane Thiney, pour qui les deux équipes ont en commun « une grosse présence défensive ».

En championnat de France, les Lyonnaises, championnes depuis 2007, possède encore 3 points d’avance sur le PSG à la 19e journée cette saison. Mais lors du dernier match le 5 février dernier au Stade Charléty, les deux équipes se sont neutralisées (0-0). « Comme lors de son élimination en 8e de finale la saison dernière, l’OL a juste manqué d’efficacité lors de ce match. Berger, la gardienne allemande du PSG, a sorti un grand match. Pour contrer Lyon, il faut les faire déjouer », éclaire Laure Lepailleur.

Lotta Schelin et Griedge Mbock lors du match Paris-Lyon le 5 février 2016. | FRANCK FIFE / AFP

Gaëtane Thiney pointe, elle, peut-être une légère et relative période de doute pour les Lyonnaises, que Juvisy a presque accroché en championnat (défaite 1-0 le 3 avril dernier) et pour les Parisiennes éliminées par Montpellier en Coupe de France. « Face à nous, Lyon a paru moins inspiré qu’à l’habitude. On est passé à un rien du match nul. Paris a perdu en Coupe. Les deux ne sont pas forcément en confiance. Ce match déterminera lequel finira le mieux la saison ».

  • Le recrutement

« Quand on a un gros budget (on parle de 7,5 millions d’euros pour le PSG, 5,5 pour l’OL), on peut acheter de grandes joueuses mais ça ne suffit pas. Il faut arriver à les faire jouer ensemble », livre d’entrée Laure Lepailleur. L’entraîneur adjointe affiche une préférence pour la manière de recruter de l’OL : « Le recrutement lyonnais me paraît plus intelligent avec très peu d’erreur. L’équipe a été bâtie sur un groupe solide auquel viennent s’ajouter des retouches. L’arrivée de la Norvégienne Ada Hegerberg (meilleure buteuse du championnat avec 29 buts et 10 buts en Ligue des champions) est par exemple très réussie. Le PSG a acheté beaucoup de joueuses de qualité mais peut-être avec un déséquilibre parfois dans le groupe ».

>> Lire le portrait de Laura Georges

  • Implication du club

En 2014, la défenseuse internationale du PSG Laura Georges regrettait dans les colonnes du Monde une présence trop peu importante de son président, Nasser Al-Khelaifi. Une vision que partagent les observateurs neutres de Juvisy. « À Paris, les dirigeants sont moins impliqués qu’à Lyon dans leur section féminine. L’investissement financier important semble entrer dans une dimension de communication et pour répondre à celui de Lyon. Dans les deux cas, c’est une bonne chose pour le football féminin », expose Gaëtane Thiney.

Une tendance qui ne date d’ailleurs pas de l’arrivée des Qataris en 2011, puisque Laure Lepailleur n’a disputé qu’une seule rencontre au Parc des Princes en 65 matchs avec le PSG entre 2009 et 2012. Initialement prévu au Stade Charléty, le match retour entre Lyon et Paris se déroulera exceptionnellement dans la mythique enceinte du PSG. « C’est un premier pas de fait. Espérons que cela soit le début de quelque chose. C’est aux Parisiennes à saisir cette opportunité pour gagner en image au sein de leur club », lance Laure Lepailleur.

Les mauvais esprits pourront peut-être penser que ce changement n’aurait pas été effectué si les hommes du PSG n’avaient pas été sortis en quart de finale par Manchester City… « Je ne sais pas si ça a un lien. En tout c’est très positif », dit Gaëtane Thiney.