Portrait de Bachar Al-Assad dans les rues de Damas en mars 2015. | LOUAI BESHARA / AFP

Des milliers de témoignages de victimes, de documents et de photos à l’appui, des enquêteurs de l’ONU accusent le régime de Bachar Al-Assad d’« extermination » de ses prisonniers, selon un rapport publié lundi 8 février, deux mois après un rapport de l’ONG Human Rights Watch (HRW) sur la pratique de la torture en Syrie.

« Le caractère massif des morts de détenus suggère que le gouvernement syrien est responsable d’actes qui relèvent de l’extermination et sont assimilables à un crime contre l’humanité », a déclaré le chef de la commission Paulo Pinheiro devant la presse à Genève.

Boire l’eau des latrines

Le rapport, qui porte sur la condition des détenus par toutes les parties du conflit – Etat islamique compris –, décrit une situation particulièrement dramatique dans les prisons et centres de détention tenus par le régime de Damas. Selon les témoignages qu’ils ont recueillis, les détenus sont battus à morts, torturés, laissés sans soins…

D’autres sont morts faute de soins et en raison de « conditions de vie inhumaines », notamment dans des cellules surpeuplées et dépourvues d’hygiène, de nourriture et d’eau potable, de nombreux prisonniers étant forcés de boire l’eau des latrines pour soulager leur soif. « Un grand nombre de prisonniers sont morts de diarrhée », indiquent les experts, ajoutant que « les victimes ont souvent souffert durant des mois avant que la mort ne survienne ».

Un témoin a décrit comment un vieil homme détenu dans un centre militaire à Homs avait été durement battu puis pendu par les poignets. « Les gardiens lui ont brûlé les yeux avec une cigarette et ont transpercé son corps avec un objet tranchant chauffé », indique le rapport, ajoutant qu’« après être resté pendu dans la même position durant trois heures, l’homme était mort ».

« Politique d’Etat »

« Il est évident que les autorités gouvernementales (…) étaient au courant que les morts se produisaient sur une échelle massive », soutiennent les enquêteurs, qui voient dans le traitement réservé aux détenus le résultat d’« une politique d’Etat ayant pour but de s’en prendre à la population civile ».

Le rapport détaille également dans son rapport les sévices infligés à ses prisonniers par le groupe Etat islamique, y compris le recours à la torture et aux exécutions sommaires, accusant l’organisation de crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Le rapport accuse par ailleurs la branche syrienne d’Al-Qaida Jabhat al-Nusra d’avoir procédé à des « exécutions en masse » de soldats du gouvernement faits prisonniers.