La foule – plus de 35 000 personnes selon la police, 90 000 selon les organisateurs – a défilé dans le calme jusqu’en milieu d’après-midi, arborant des pancartes contre le TTIP, un des acronymes de cet accord très controversé, également appelé Tafta. | Markus Schreiber / AP

Plusieurs dizaines de milliers de personnes ont manifesté samedi 23 avril à Hanovre, dans le nord de l’Allemagne, contre le projet d’accord de libre-échange transatlantique que Barack Obama et Angela Merkel défendent à l’unisson, à la veille de la visite du président américain dans le pays.

La foule – plus de 35 000 personnes selon la police, 90 000 selon les organisateurs – a défilé dans le calme jusqu’en milieu d’après-midi, arborant des pancartes contre le TTIP, un des acronymes de cet accord très controversé, également appelé Tafta.

« Nous ne voulons pas du TTIP. Nous souhaitons la démocratie, pas la culture du secret et le pouvoir des grandes entreprises », s’insurge Hanna Berlin, une retraitée de 66 ans.

« Il n’y a aucune raison de marcher dans les pas des Etats-Unis. La société européenne n’a pas besoin de progresser au détriment de l’environnement », renchérit Ladislav Jelinek, un Tchèque de 38 ans résidant en Allemagne depuis deux ans.

Avec seulement 17 % des Allemands voyant l’accord TTIP comme « une bonne chose », selon un sondage de la Fondation Bertelsmann, le pays est à la pointe de la contestation européenne et avait déjà vu défiler entre 150 000 et 250 000 personnes à Berlin en octobre. ONG et syndicats dénoncent depuis des mois l’accord, qui nivelle selon eux les normes sanitaires européennes par le bas, et laisse la possibilité aux multinationales de contester les lois d’un Etat devant une justice d’arbitrage.

Scepticisme partagé par les Américains

Le scepticisme enfle d’ailleurs des deux côtés de l’Atlantique : 15 % des Américains pensent que l’accord TTIP est « une bonne chose », contre plus de 50 % en 2014.

En visite à Londres, M. Obama s’est montré compréhensif samedi à l’égard des craintes suscitées par le projet de traité. Par le passé, les accords commerciaux ont « parfois servi les intérêts des grandes entreprises et pas nécessairement ceux des salariés des pays où elles sont installées », a-t-il reconnu.

Le président américain fait cependant du libre-échange une de ses priorités pour sa dernière année au pouvoir. Il a d’ailleurs estimé dans les colonnes de Bild, le quotidien le plus lu d’Allemagne, que le texte constituait « un des meilleurs chemins pour promouvoir la croissance et créer de l’emploi ». Il entend par sa venue dimanche et lundi en Allemagne aider à faire redémarrer des négociations actuellement au point mort, à la veille d’un nouveau cycle de négociations — le 13e depuis 2013 — qui doit débuter lundi à New York.

Angela Merkel a elle aussi voulu rassurer son opinion, avant d’accueillir M. Obama à Hanovre dimanche. « Nous ne reculons pas sur nos normes, nous protégeons ce qui se fait aujourd’hui en Europe en matière d’environnement et de protection des consommateurs », a affirmé la chancelière dans un message vidéo diffusé par ses services.

Ce traité « gagnant-gagnant » est une chance pour l’UE de « définir des normes d’envergure mondiale », selon elle. Berlin espère encore obtenir un accord avec les Etats-Unis d’ici à la fin de l’année. Le temps presse. L’élection présidentielle approche à grands pas et ni Hillary Clinton ni Donald Trump, les deux favoris, ne semblent déterminés à faire aboutir les négociations, l’opinion publique américaine étant devenue réticente au sujet du libre-échange.