Christine Lagarde et Xavier Giocanti le 9 novembre 2014. | Charles Platiau / Reuters

«Xavier, le foot ne l’a jamais intéressé…» Renaud Muselier, ancien secrétaire d’Etat et vice-président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (LR) n’en revient toujours pas. L’annonce par le journal L’Equipe, mardi 19 avril, que celui qu’il appelle son «frère», Xavier Giocanti, succéderait prochainement à Vincent Labrune à la présidence de l’Olympique de Marseille, le laisse dubitatif. Le matin même, l’intéressé lui a adressé un SMS de démenti. «C’est des conneries», a écrit le compagnon de la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, à son ami de quarante ans.

Il y a une semaine à peine, Renaud Muselier, qui est étroitement associé dans des projets immobiliers et des cliniques à François-Michel Giocanti, le frère cadet de Xavier Giocanti, moquait la perspective : « Xavier ne mettra jamais un centime dans l’OM… ». Depuis, le bruit a fait du chemin et la presse s’obstine à placer le promoteur marseillais en pole position pour s’installer dans le fauteuil brûlant de président de l’Olympique de Marseille.

Joint par Le Monde, Xavier Giocanti refuse de s’exprimer sur le sujet.

« Je ne réponds pas, car la presse fait de l’autoallumage à partir de rumeurs. »

Et de renvoyer au démenti adressé dans la matinée par Margarita Louis-Dreyfus, où la propriétaire de l’OM qualifie l’information « d’annonce sans fondement ».

« Pas d’actualité »

« Elle m’a demandé conseil dans cette phase difficile pour l’aider à trouver des solutions, assure encore M. Giocanti. La question de mon intérêt pour le poste de président de l’OM n’est pas d’actualité ».

Alors que le club marseillais est en pleine tempête, annonçant le licenciement de son entraîneur, l’Espagnol Michel, et son remplacement par Franck Passi, assisté de la légende locale Basile Boli en tant que directeur sportif, l’hypothèse avancée par l’Equipe ajoute au trouble.

Si on le donne candidat à l’une des fonctions les plus médiatiques du football français, Xavier Giocanti n’a, paradoxalement, jamais cherché la lumière. Sa relation avec Christine Lagarde, débutée il y a une dizaine d’années lors d’un voyage ministériel à Marseille de l’ex-ministre du budget, est la seule raison qui lui vaut, parfois, l’attention des médias nationaux.

A 61 ans, ce Corse d’origine, dont les racines sont dans le village de Guagno, près d’Ajaccio, apprécie le soleil du Cercle des nageurs marseillais, club huppé où il perfectionne son teint hâlé et sa silhouette dynamique. Mais côté business, il préfère travailler dans l’ombre. A la chambre de commerce et d’industrie Marseille-Provence, on loue son « sérieux » et ses « qualités d’entrepreneur », mais on note que M. Giocanti n’a jamais cherché à intégrer la structure. Les syndicats patronaux locaux, pour qui il est loin d’être un inconnu, n’ont, pas plus, reçu sa candidature…

« Il est au-dessus des tambouilles »

Promoteur et spécialiste de la défiscalisation, Xavier Giocanti pilote le groupe immobilier Résiliance, dans le 15e arrondissement de Marseille. Un groupe spécialisé dans les projets dans les zones franches urbaines (ZFU) — qui affiche environ 600 000 euros de chiffres d’affaires — que l’Etat a installé dans les quartiers nord de Marseille. Sa dernière réussite s’appelle la Cité de la Cosmétique, un espace d’activités de 4 800 m2, réunissant entreprises, services liés au monde de la beauté, mais aussi un restaurant et des salles de réception. Inauguré en 2009, le lieu accueille cinq ans plus tard soixante entreprises et deux cent vingt salariés dans une zone où le chômage atteint des sommets.

« Xavier Giocanti a pris le risque de se poser dans des quartiers pas simples, où peu de gens veulent investir », dit de lui Franck Dumontel, conseiller politique et mari de la sénatrice Samia Ghali (PS).

Il ajoute:

« C’est un vrai Marseillais qui entreprend dans sa ville, pas un parachuté. Et il a prouvé qu’il savait monter des projets sérieux dans la durée. Ce qui pourrait être une option rassurante dans le cadre de l’OM. »

Dans l’entourage de la maire du 8e secteur, on dit aussi que Xavier Giocanti sait dépasser les clivages politiques. Compagnon de Christine Lagarde, ami de Renaud Muselier, mais capable de discuter avec les élus socialistes. « Il est au-dessus des tambouilles. Il peut travailler avec tout le monde » poursuit Franck Dumontel.

Circonspection

A la mairie de Marseille, pourtant, où le maire, Jean-Claude Gaudin (LR), a rappelé en fin de semaine qu’il n’entendait pas abandonner son « droit de regard » sur l’avenir du club, on regarde la solution Giocanti avec circonspection. Son amitié avec Renaud Muselier, avec qui les relations sont tendues depuis quelque temps, n’y est sûrement pas pour rien.

Donné comme partenaire potentiel de l’aventure Giocanti à la tête de l’OM, Jean-Marie Cantona, le frère d’Eric Cantona, l’icône de Manchester United, n’y croit pas plus que les autres. Les deux hommes se croisent au Cercle des nageurs de Marseille, dont ils sont deux piliers. « On se connaît depuis longtemps, on se voit souvent, on parle de tout et de rien, glisse l’agent de joueurs professionnels. Jamais Xavier ne m’a dit qu’il voulait reprendre l’OM, ni ne m’a demandé des conseils sur la question. »

« Financièrement, économiquement et politiquement, la solution Giocanti est impossible, balaye quant à lui Olivier Grimaldi, l’avocat de l’OM. Je n’ai rien à en dire de plus. »