La Tesla Model 3 affiche un prix plancher de 31000 euros. | AP

Le Model 3 de Tesla n’est pas encore un succès commercial et industriel. Mais le lancement canon, le 31 mars, de la première voiture électrique « accessible » de la firme californienne, qui a collecté 325 000 précommandes en seulement une semaine, constitue bien plus qu’un succès d’estime. Cet enthousiasme, même s’il faut le relativiser, souligne en creux une réalité : jusqu’alors, les voitures électriques destinées au grand public n’ont jamais été capables d’exciter la passion des amateurs d’automobile.

Le Model 3 affiche deux atouts importants. Attendu fin 2017 au prix plancher de 35 000 dollars (31 000 euros) hors primes publiques, il est abordable. Comparé au Model S, lancé en 2012, et au Model X, commercialisé depuis quelques semaines, il est au moins deux fois moins cher.

Par ailleurs, sorte de condensé du majestueux Model S, la future Tesla exhale quelque chose qui va au-delà de l’intérêt que l’on peut éprouver pour un véhicule high-tech : elle fait envie. Bénéficiant de l’aura dont a su s’entourer Tesla – une réputation de marque avant-gardiste renforcée par la récente conversion aux modèles tout électriques de presque toutes les grandes marques sportives –, cette voiture se présente comme la possibilité d’accéder à une forme de luxe écolo-ostentatoire.

Un défi industriel pour la firme

Une carte que les grandes marques n’ont pas jouée, car une telle approche ne s’inscrit pas dans leur culture. La Nissan Leaf, excellente voiture électrique facturée un peu moins de 30 000 euros (prime comprise), offre 250 km d’autonomie, mais il est vrai que l’on ne se retourne pas sur son passage. Idem pour la Renault Zoé (un peu plus de 15 000 euros, prime comprise), pétrie de qualités mais trop timide, comme la BMW i3, spéciale mais pas très glamour.

Ces voitures destinées à la grande diffusion ont été conçues avec une « enveloppe » destinée à rassurer avant de séduire. Or, les temps où les acheteurs de voitures électriques – qui sont majoritairement des particuliers – étaient des ingénieurs d’EDF à la retraite, des esthètes pro-environnement ou des « early adopters » en quête de nouveauté, sont révolus. Ce genre de véhicule ne doit plus seulement donner bonne conscience, mais avoir quelque chose d’intrinsèquement excitant, comme tout véhicule qui se destine à une catégorie de connaisseurs un tant soit peu fortunés. Dans ce sens, le buzz suscité par le Model 3 devrait inciter les constructeurs à faire preuve de davantage de créativité.

Avec sa modestie habituelle, Tesla a salué « le plus grand lancement jamais réalisé en une semaine par un constructeur ». C’est peut-être vrai, mais il convient de rappeler que, si les aspirants à l’achat d’un Model 3 ont versé 1 000 dollars, il ne s’agit que d’un acompte pouvant être récupéré à tout moment. Reste à relever un énorme défi industriel pour Tesla, qui n’a produit que 50 000 véhicules l’an passé et a accumulé les retards lors de la mise au point des Model S et X.