Janina Panasewicz.#EnMémoireBruxelles | D.R

Personne ne l’a jamais appelée Janina. Le prénom que ses parents lui avaient choisi, mais dont le prêtre n’a pas voulu, était Grazyna. Qui deviendra rapidement Grana. C’est dire si l’épitaphe “Janina Panasewicz, Polonaise, 61 ans”, affichée sur le mur du souvenir de Maelbeek résonne peu dans le cœur de sa fille, Anna, 36 ans, installée en Belgique depuis 2004. “Pour les autres victimes, ils ont ajouté ’musicologue’, par exemple, mais pour elle, pas un mot. Ils auraient pu écrire : ‘une maman formidable’”.

Une maman formidable… Deux mots qui semblent résumer la mission de Janina Panasewicz sur terre, celle qu’elle s’était imposée et qu’elle avait le sentiment d’avoir accompli. Cette “nounou en or” avait confié, voici peu, à la dame qui l’employait depuis dix-huit ans, qu’elle n’avait pas peur de mourir. Elle disparaîtra le 22 mars à Bruxelles dans l’attentat à la station de métro Maelbeek. Elle devait rejoindre sa famille le lendemain en Pologne pour les fêtes de Pâques. A 8h57, elle a appelé sa fille. “Je n’ai pu répondre à son appel. Nous nous parlions tous les jours. Elle m’avait demandé d’enregistrer son billet d’avion. Elle voulait sans doute s’assurer que je l’avais fait. Après, j’ai essayé de la rappeler. Trop tard. J’ai très vite su…”

Janina est née le 7 septembre 1955 à Wegrow, une petite ville située à 80 kilomètres de Varsovie. Elle y a épousé Waldemar et mis au monde ses trois enfants, Ewa, 38 ans, Anna, 36 ans et Pawel, 34 ans.

Coiffeuse de formation, elle a travaillé vingt ans chez Zwut, une usine qui produisait du matériel de télécommunications pour la Russie. Puis, souffrant de maux de dos, elle s’est retrouvée dépendante de l’assurance-maladie, et finalement sans revenus. Une de ses amies ayant trouvé du travail en Belgique, Janina l’y a suivie en 1998.

“Grana” s’est alors installée dans un petit appartement, place Madou, qu’elle avait quitté bien rangé, comme chaque matin, le mardi 22 mars.

Depuis mai 1998, elle travaillait chez Brigitte, à Uccle. “Grana venait tous les soirs de 18 à 20 heures. Elle était chez nous le 21. Elle m’a aidée à élever mes trois enfants. Elle était comme une deuxième maman pour eux. Elle ne se plaignait jamais, toujours de bonne humeur, généreuse, volubile. Une très belle personne”.

Pierre, 13 ans, se souvient de la gentillesse et des talents culinaires de sa nounou. Grâce à elle, le gâteau au chocolat n’a plus de secret pour lui. “On n’avait pas besoin de se parler pour se comprendre”, ajoute sa sœur Laura. “Les jours où elle était plus sombre, on le voyait”. Elle s’inquiétait pour sa petite-fille de 13 ans, atteinte d’un handicap sévère.

Janina Panasewicz a été la dernière victime a être identifiée. “Elle devait être assise juste en face ou à côté des terroristes”, confie sa fille, qui n’a plus envie de rester en Belgique.

Le 1er avril, elle aurait dû célébrer la Sainte-Grazyna dans son village. Mais c’est à Bruxelles qu’Anna a réuni ses proches autour d’une messe de funérailles. « Ce jour-là, mon père m’a dit: Tu vois, elle nous a tout de même préparé une fête », raconte Anna, des larmes plein les yeux.

Un contenu de cette page n'est pas adapté au format mobile

Laurence Bertels (La Libre Belgique)