Des abeilles noires sur l’île d’Ouessant, en France. | FRED TANNEAU / AFP

Les sénateurs ont adopté en deuxième lecture, dans la nuit de jeudi à vendredi 13 mai, un projet de loi sur la biodiversité largement édulcoré. Alors que cette future loi-cadre, déposée par le gouvernement en mars 2014, suivait jusqu’ici un parcours législatif favorable, son passage au Sénat aura été marqué par une longue liste de renoncements.

Beaucoup plus audacieux en première lecture, les sénateurs ont reculé notamment sur la taxation de l’huile de palme et sur les pesticides néonicotinoïdes, considérés comme nocifs pour les abeilles.

Le poids des lobbys

« J’attendais beaucoup de cette lecture au Sénat, on m’avait vanté le débat constructif et respectueux de la première lecture et j’espérais un débat de la même qualité », a commenté la secrétaire d’Etat chargée de l’environnement, Barbara Pompili. Mais « les convictions chevillées au corps de la secrétaire d’Etat que je suis sont un peu déçues. Je regrette que l’on en soit encore à des considérations que je croyais dépassées ».

« L’esprit de compromis qui avait prévalu en première lecture ne s’est pas retrouvé lors de cette deuxième lecture et les lobbys de la chimie, de l’agro-industrie, de la chasse et du béton ont pesé de tout leur poids pour freiner toute reconquête de la protection de la biodiversité », a aussi accusé le chef de file écologiste pour le texte, Ronan Dantec.

« Nous nous réjouissons de la reconnaissance du préjudice écologique », a déclaré Jean-Jacques Filleul, du Parti socialiste (PS). « Mais le principe de zéro perte nette de non-régression de la biodiversité a malheureusement disparu, comme les dispositions sur la biopiraterie, la taxe sur l’huile de palme et les gains de biodiversité. » « Le débat a bien peu tenu compte de la science qui démontre sans ambiguïté que la biodiversité s’effondre, que les pertes s’accélèrent en Ile-de-France », a ajouté Chantal Jouanno.

« Deux acquis importants »

Le président de la commission du développement durable, Hervé Maurey (UDI-UC), a salué au contraire « deux acquis importants de cette lecture : la création du préjudice écologique d’une part ; les néonicotinoïdes d’autre part ». Le Sénat s’est prononcé jeudi pour une diminution progressive de ces derniers, mais sans fixer de date limite comme le souhaitait le gouvernement.

Seuls 208 sénateurs, sur 341, se sont prononcés à l’issue du nouveau débat : 156 ont voté pour et 52 contre, les socialistes s’étant abstenus. Le texte doit faire à présent l’objet d’une commission mixte paritaire chargée de trouver une version commune avec l’Assemblée. En cas d’échec, les députés auront le dernier mot après une nouvelle lecture.