BNP Paribas pourrait se retirer totalement des îles Caïmans britanniques en y fermant ses dernières branches encore actives, ainsi que l’y exhortent depuis deux ans les ONG et l’association altermondialiste Attac, au nom de la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales internationales.

Est-ce l’effet des « Panama papers » et du nouveau coup de projecteur porté sur les paradis fiscaux ? Selon des informations obtenues par Attac, la banque française a l’intention de fermer très prochainement les quatre entités qu’elle détient encore dans ce paradis fiscal des Caraïbes, dont deux succursales.

Cette annonce aurait été faite officiellement aux salariés du groupe le 3 mai, lors d’une réunion de la commission financière du comité central d’entreprise, affirme l’association, sur la base d’un procès-verbal de cette réunion. Interrogée, BNP Paribas n’a toutefois pas encore commenté l’information, mardi 24 mai en début de matinée.

Succursale au Panama en cours de liquidation

Si elle était confirmée, cette décision serait l’aboutissement logique d’un processus mûri depuis quelques années. Deux succursales de BNP Paribas, également établies aux Caïmans (BNP Paribas Fortis et First Hawaiian Bank), ont ainsi déjà été liquidées cette année, réduisant le nombre d’implantations de la banque sur ce territoire de six à quatre désormais.

Lors de cette même réunion du comité d’entreprise du 3 mai, BNP Paribas a précisé que sa succursale au Panama restait en cours de liquidation. Lancée en juillet 2010, cette opération n’a, en effet, toujours pas obtenu l’aval du régulateur local.

Ainsi, pour BNP Paribas, le choix de fermer les Caïmans s’inscrirait dans la volonté de se désengager des Etats et territoires jugés non coopératifs, ou insuffisamment, en matière de lutte contre la fraude fiscale. L’enjeu est moins financier que lié à la réputation et à l’image du groupe. La banque affirme y avoir été présente pour des raisons « opérationnelles » et non fiscales.

Selon les chiffres publiés par la banque dans son document de référence pour 2015, les îles Caïmans ont représenté cette année-là seulement 134 millions d’euros de bénéfices, soit un montant faible à l’échelle du groupe. La banque n’y emploie aucun salarié, l’activité aux Caïmans étant en réalité pilotée et gérée depuis les Etats-Unis.

« Une victoire importante »

Pour sa part, Attac voit dans ce retrait le résultat de « plusieurs mois de mobilisation de l’association et de ses partenaires » contre l’opacité des paradis fiscaux. Des opérations très médiatisées de « faucheurs de chaises » dans les agences de la banque ont notamment été conduites tout au long de l’année, pour sensibiliser l’opinion publique au sujet.

Pour Dominique Plihon, porte-parole d’Attac, « le retrait des îles Caïmans (…) est une victoire importante car ce paradis fiscal est le numéro un mondial en matière de dépôts par des non-résidents, soit 1 310 milliards de dollars déposés dans les institutions financières locales selon les données de la Banque des règlements internationaux ».

De son côté, l’économiste Thomas Coutrot appelle à « poursuivre et amplifier les actions visant les agences des principales banques impliquées dans les paradis fiscaux ». Il estime que ces établissements « doivent non seulement y fermer leurs filiales mais également y stopper toute activité, directe ou indirecte ».

« Les banques françaises réalisent plus du tiers de leurs bénéfices à l’international dans les paradis fiscaux. C’est inacceptable. Il est temps que l’Etat prenne ses responsabilités », ajoute M. Coutrot.