Après douze heures de négociations, mardi, Frédéric Gagey, PDG d’Air France, a remis « un protocole d’accord de fin de conflit » aux syndicats de pilotes de la compagnie. | CHRISTIAN HARTMANN / REUTERS

Une éclaircie dans le ciel d’Air France. Après douze heures de négociations marathon, mardi 7 juin, Frédéric Gagey, PDG d’Air France, a remis « un protocole d’accord de fin de conflit » aux syndicats de pilotes de la compagnie. Mais rien n’indique, pour l’instant, que les trois organisations, le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), majoritaire à Air France, le Syndicat des pilotes d’Air France (SPAF) et Alter, vont lever leur préavis de grève, prévue du 11 au 14 juin. Soit juste au moment du démarrage du championnat d’Europe de football. Syndicats et direction devaient se retrouver, mercredi 8 juin, pour un nouveau round de négociations.

Toutefois, Véronique Damon, secrétaire générale du SNPL, se félicite d’une « inflexion du discours de Frédéric Gagey ». Selon elle, le PDG a noté « le problème de croissance décalée, disproportionnée entre Air France et KLM ». Toutefois, déplore Mme Damon, M. Gagey « n’apporte pas de réponse concrète ». De son côté, contacté par Le Monde, le patron d’Air France se dit d’accord pour discuter du « rééquilibrage » de la flotte de la compagnie tricolore avec celle de KLM, réclamé par les pilotes. Mais « il faut attendre Jean-Marc Janaillac, le nouveau PDG d’Air France-KLM », dont l’arrivée est prévue le 4 juillet. Selon la direction, le nouveau PDG en fera « une de ses priorités ».

Les pilotes réclament des « engagements »

Pour lever leur préavis de grève, les syndicats de pilotes réclament non « des promesses mais des engagements fermes » d’Air France. Mais pas question de prendre « des engagements fermes en période de changement de gouvernance. Cela ne peut pas se faire », leur aurait répondu la direction. Les syndicats de pilotes disent ne pas pouvoir s’en satisfaire. Ils y sont poussés par leur base. Selon une étude confidentielle menée par le SNPL, à laquelle ont déjà répondu la moitié des pilotes, 91 % d’entre-eux ne feraient pas confiance à la direction pour diriger la compagnie dans la situation actuelle.

La principale revendication des pilotes, c’est le « rééquilibrage » entre Air France et KLM. Les trois syndicats réclament un retour à l’accord de 2006, qui prévoyait un rapport de force, en faveur d’Air France, de 63/37 en nombre d’avions. La direction veut bien discuter « de la part d’Air France dans la compagnie Air France-KLM ». Notamment parce que le « redressement d’Air France lui a permis de retrouver un peu de marges financières », explique-t-elle. En 2015, et pour la première fois depuis 2008, la compagnie a dégagé un bénéfice de 118 millions d’euros.

Quelques avancées

Pour les pilotes, il ne faudrait pas moins de vingt avions supplémentaires sur cinq ans pour qu’Air France rétablisse l’équilibre avec KLM. Un investissement de plus de 3 milliards d’euros. Le triple de l’effort financier réalisé par la compagnie en 2015. Vendredi 3 juin, à l’occasion de l’assemblée générale de l’Association internationale du transport aérien (IATA), M. Gagey a seulement confirmé que la flotte long-courrier d’Air France accueillerait cinq Boeing 787 d’ici à 2017. Mais, dans le même temps, la compagnie sortirait un nombre équivalent d’Airbus A340. Toutefois, comme un signe de bonne volonté, Air France a prévu « de pousser jusqu’au bout » ses Airbus.

La direction serait d’accord pour revaloriser jusqu’à 45 % les heures de nuit

Au cours de cette première nuit de négociations, la direction a consenti quelques avancées. Une bienveillance qui est peut-être la conséquence de la réunion, lundi 6 juin à Matignon, qui a réuni des dirigeants d’Air France et des conseillers du premier ministre, Manuel Valls, et d’autres venus de l’Elysée. Par ailleurs, Gilles Gateau, nouveau directeur des ressources humaines de la compagnie était auparavant directeur adjoint de cabinet et conseiller social de Manuel Valls.

In fine, la direction serait d’accord pour revaloriser jusqu’à 45 % les heures de nuit. En revanche, pas question d’accorder une augmentation des salaires de 11,3 %, comme l’a demandé le SPAF. La direction pointe que la hausse a déjà été de 7 % en moyenne en 2015, du fait d’une augmentation des heures de vol. Pour les mêmes raisons, ajoute-t-elle, les rémunérations des pilotes auraient aussi progressé de 3 % entre janvier et mai.

Pour lever leur préavis de grève, les syndicats exigent aussi des engagements sur le devenir de HOP !, la filiale qui regroupe les trois compagnies régionales d’Air France. Le SNPL souhaite qu’Air France s’engage à rester majoritaire au capital de HOP !. Le syndicat veut aussi se protéger contre de futurs accords de partenariats, notamment avec des compagnies asiatiques, en cours de discussion.

Le SNPL, veut des engagements pour que les lignes de la compagnie soient, à l’avenir, majoritairement effectuées par Air France. Enfin, le dernier point d’achoppement reste Transavia, la filiale à bas coûts d’Air France. Les trois organisations demandent que « le plan de charge soit respecté jusqu’en 2020 ». La direction s’était engagée à augmenter la flotte pour atteindre à cette date 37 appareils.