Vincenzo Nibali a remporté le 99e Tour d’Italie. | LUK BENIES / AFP

Vincenzo Nibali, alias le Requin de Messine, est encore plus dangereux quand il est blessé dans son orgueil, en coureur d’instinct qui a su inscrire, dimanche 29 mai, le Giro pour la deuxième fois à son palmarès, à l’âge de 31 ans. « J’ai toujours accompli mes grandes performances après une défaite », déclarait le Sicilien à six jours de son triomphe de Turin.

Sa victoire magistrale dans le Tour de France 2014 - la première d’un coureur italien depuis 1998 - suivait une séquence pleine de doutes à son égard, quand il peinait à rivaliser dans les courses de préparation. Son coup d’éclat dans le Tour de Lombardie 2015 succédait à une exclusion vaguement honteuse de la Vuelta, pour s’être accroché à la voiture de son directeur sportif.

Il incarne une forme de romantisme

L’homme est calme mais de tendance ombrageuse, facilement sensible. Après son succès d’étape à Risoul, il n’a pu retenir ses larmes pendant de longs instants, prostré sur le vélo. Loin des stéréotypes, Nibali incarne même s’il s’accommode des spécificités de son époque, d’un cyclisme qui prétend à une vérité scientifique et se base sur des chiffres.

Quand le leader d’Astana, la formation kazakhe qu’il a rejointe en 2013 après ses huit premières saisons professionnelles passées dans des équipes italiennes, s’est retrouvé en difficulté dans le Giro, il a passé des tests médicaux. Le verdict (« Ses valeurs sont bonnes », a déclaré le médecin) l’a rassuré, tout comme l’avis de son masseur personnel, Michele Pallini, l’homme qui le connaît sans doute le mieux.

S’il ressemble à un pur-sang doté de qualités physiques de fond, Nibali est surtout un coureur d’instinct, capable de déstabiliser ses adversaires. Indifférent au mauvais temps, il a triomphé sous la neige des Trois Cimes de Lavaredo lors de son premier succès dans le Giro en 2013. Bon grimpeur, il est surtout un descendeur d’exception, l’une des références de son époque. « La descente comme la montée est une phase de la course », a-t-il rappelé après la chute, vendredi, de son adversaire, le Néerlandais Steven Kruijswijk, dans les premiers lacets du col d’Agnel.

Devenir champion olympique

Le Sicilien aux yeux noirs se réclame de sa terre natale, porteuse de tant de clichés et de préjugés. Il rappelle volontiers son enfance dans une famille modeste, ses premières émotions cyclistes quand il accompagnait son père, Salvatore, un ancien coureur amateur qui tenait un petit labo de photos-vidéos. Avant de partir à l’adolescence où il a suivi sa formation de coureur.

Tenace, Nibali a atteint son « objectif absolu » qui était de gagner chacun des trois grands Tours (Giro, Tour de France, Vuelta). Il est l’un des six coureurs dans l’histoire à avoir accompli cet exploit. Il lui reste maintenant, alors qu’il est passé à côté du titre mondial en 2013 (4e sur le circuit de Florence), à réussir le nouveau défi : devenir champion olympique.