Les drapeaux britannique et européen à Lille. | PHILIPPE HUGUEN / AFP

A un mois exactement du référendum britannique pour rester ou sortir de l’Union européenne, la rhétorique des deux camps s’enflamme. Le Trésor britannique a publié lundi 23 mai une étude catastrophique sur l’impact d’un éventuel Brexit. Conclusion : cela provoquerait une récession pendant un an, du deuxième semestre 2016 à la fin du premier semestre 2017 (– 0,1 % de croissance sur chacun des quatre trimestres). Sur deux ans, la croissance du produit intérieur brut (PIB) serait réduite de 3,6 points par rapport à ce qu’elle aurait été en restant dans l’UE, 500 000 emplois seraient perdus, la livre sterling baisserait de 12 %, les prix immobiliers de 10 % et les salaires réels moyens reculeraient de 3 %.

Et encore n’est-ce que la vision modérée du rapport. Un scénario du pire prédit sur deux ans que le PIB perdrait… six points, avec à la clé 800 000 emplois perdus. « Le 23 juin, les Britanniques font face à un choix clair : la sécurité économique avec un vote pour rester (dans l’UE), ou un saut dans l’inconnu qui coûterait des emplois et augmenterait les prix », avertit le premier ministre David Cameron.

La colère des partisans du Brexit

Ces scénarios catastrophiques, calculés par les services du Trésor, ont provoqué la colère des partisans du Brexit. « Il faudrait que la campagne soit juste, mais le camp de ceux qui veulent rester dans l’UE utilise de façon inappropriée les fonctionnaires et la machine de l’Etat », attaque Iain Duncan Smith, l’un des leaders du Brexit. Et de se moquer du ton apocalyptique de ses opposants. « Si on les croyait, le monde s’effondrerait en sortant de l’UE. Ce serait risible si ce n’était pas aussi sérieux. » M. Smith rappelle que les prévisions des économistes sont presque systématiquement fausses et que personne n’avait prévu la crise de 2008.

Le rapport du Trésor de ce lundi porte sur les conséquences à court terme d’un Brexit. Le mois dernier, il s’était penché sur les risques à long terme, concluant qu’une sortie de l’UE coûterait 6 point de PIB d’ici 2030. Cette fois-ci, il s’est penché sur la période de transition de deux ans suivant le vote.

Immédiatement après le verdict des urnes, selon le rapport, les marchés financiers réagiraient violemment. La livre sterling dévisserait, provoquant assez rapidement une poussée d’inflation. Les taux des bonds du Trésor augmenteraient.

Ensuite, la période d’incertitude pousserait les entreprises à suspendre leurs investissements, en attendant d’y voir plus clair. Le rapport prend l’exemple du transport aérien : actuellement, la législation européenne permet à n’importe quelle compagnie de relier les villes européennes de leur choix. Après le Brexit, il faudrait attendre de longues renégociations avant de connaître les droits qu’auraient une grande compagnie paneuropéenne comme easyJet. La même chose s’applique aux services financiers, à l’industrie automobile ou à toutes les autres entreprises qui exportent en Europe.

De nombreux scénarios possibles

Selon l’article 50 du traité de l’UE, le Royaume-Uni aura une période de négociation de deux ans à partir de l’annonce de son retrait. Il lui faudrait ensuite déterminer l’accès qu’il entend conserver au marché unique, qui compte pour 45 % de ses exportations. De nombreux scénarios sont possibles : les modèles norvégien, suisse, canadien et même albanais ont été mis en avant par les partisans du Brexit. Ils vont d’un accès quasiment complet à l’UE – mais qui inclue de respecter la législation européenne et la libre-circulation des personnes – à devenir un simple membre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), avec l’application des droits de douane que cela signifie.

L’économie est l’argument massue utilisé par le camp du maintien dans l’UE. Les sondages indiquent que les Britanniques semblent dans leur majorité convaincus qu’ils perdraient financièrement à un retrait. En face, le camp du Brexit gagne sur la question de l’immigration : les Britanniques semblent accepter l’idée qu’une sortie de l’UE permettrait de regagner « le contrôle de nos frontières ». Entre les deux, la question est de savoir lequel des deux arguments sera finalement le plus important.