Magasins fermés à Cumana (Venezuela), où la crise alimentaire a engendré des pillages. | MANUEL TRUJILLO / AFP

L’assemblée générale de l’Organisation des Etats américains (OEA) s’est ternimée mercredi 15 juin à Saint-Domingue par des appels au dialogue pour tenter de mettre un terme à la crise vénézuélienne. A la surprise générale, la réunion a été le théâtre d’un dégel entre les Etats-Unis et le Venezuela qui avaient rappelé leurs ambassadeurs en 2010. Après avoir réclamé l’organisation d’un référendum sur la révocation de Nicolas Maduro dès cette année et la libération des prisonniers politiques, le secrétaire d’Etat américain John Kerry a rencontré la ministre vénézuélienne des affaires étrangères Delcy Rodriguez pour annoncer la reprise d’un « dialogue immédiat » entre Caracas et Washington.

A la demande du Venezuela, les médiateurs de l’Union des nations sud-américaines (Unasur), les anciens présidents José Luis Rodriguez Zapatero (ancien chef du gouvernement espagnol), Leonel Fernandez (République dominicaine) et Martin Torrijos (Panama) se rendront à Washington le 21 juin pour exposer à l’OEA les progrès de leur mission de médiation entre le gouvernement et l’opposition du Venezuela.

Deux jours plus tard, le 23 juin, l’OEA doit se pencher sur la demande de son secrétaire général uruguayen Luis Almagro, qui a demandé que la « charte démocratique » de l’organisation soit appliquée au Venezuela. Cette charte prévoit la suspension d’un pays membre en cas d’altération ou de rupture de l’ordre constitutionnel.

Mme Delcy Rodriguez a mené la charge contre le secrétaire général, l’accusant d’avoir pris la tête d’un « lynchage » du Venezuela et d’avoir publiquement qualifié son président, Nicolas Maduro, de « traitre, menteur, voleur et dictateur ». Selon Mme Rodriguez, Luis Almagro a recruté un chargé de communication, Sergio Jellinek, payé 8 000 dollars par mois pour attaquer le gouvernement vénézuélien. Le Nicaragua a volé au secours de la ministre vénézuélienne, réclamant la démission de M. Almagro. Par 19 voix contre 12, l’assemblée générale a demandé au conseil permanent de l’OEA d’évaluer les actions de son secrétaire général « au regard des normes de l’organisation ».

Haïti, Mexique et République dominicaine

Parmi les autres sujets qui ont occupé cette assemblée générale, la crise haïtienne, évoquée par John Kerry et le ministre canadien Stéphane Dion. Ils ont exprimé leur préoccupation face aux retards du processus électoral. Le ministre haïtien Pierrot Délienne a demandé l’aide de l’OEA pour la reprise, en octobre, des élections déjà reportées à trois reprises.

Egalement mise sur la table, la grave crise financière traversée par la commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH). Son président, James Cavallaro, a appelé les Etats membres à tenter d’y remédier « afin de garantir l’accès à la justice internationale des habitants des Amériques », précisant que la CIDH devrait licencier 40 % de son personnel (30 personnes) en juillet si elle ne reçoit pas rapidement au moins 2 millions de dollars.

La moitié de son budget (près de 10 millions de dollars) est fournie par l’OEA et le reste vient de contributions volontaires soumises aux aléas politiques. « Quelques pays, comme la Colombie et le Panama, ont annoncé de nouvelles contributions, d’autres, comme le Mexique, ont exprimé des critiques à l’égard du travail de la commission », soulignait Emilio Alvarez Icaza, le secrétaire général de la CIDH. Rappelons qu’un groupe d’experts de la CIDH a documenté les graves erreurs de l’enquête sur la disparition des 43 étudiants d’Iguala, au Mexique.

Enfin, à la demande du pays hôte, l’assemblée générale a approuvé à l’unanimité une déclaration d’excuses au peuple dominicain pour l’appui apporté par l’OEA à l’intervention militaire des Etats-Unis en faveur des putschistes lors de la guerre civile de 1965. Cinq anciens candidats dominicains à la présidence, dont le leader de l’opposition Luis Abinader, ont profité de la réunion de l’OEA pour dénoncer le caractère « frauduleux » des élections du 15 mai dernier. Cette consultation qui a permis la réélection du président sortant Danilo Medina a été marquée selon les opposants par « un ensemble d’irrégularités formant un modèle systématique de manipulations frauduleuses ».