Maxima Zuckerberg a de la chance. Non seulement son papa est le plus riche trentenaire du monde, mais il est aussi le plus généreux. Tellement généreux qu’il ne pense pas qu’au bonheur de sa fille, née en 2015, mais à celui de toute sa génération. « Notre société a l’obligation d’investir maintenant pour améliorer l’existence de tous ceux qui arrivent dans ce monde, pas seulement de ceux qui sont déjà là », lui a-t-il écrit peu après sa naissance. « Max » n’aura pas le souci de gérer l’immense fortune léguée par ses parents, ceux-ci s’en sont déjà chargés pour elle.

Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook et sa femme, Priscilla Chan, ont décidé de créer une fondation philanthropique qui recevra 99 % des actions qu’ils détiennent dans l’entreprise, soit, à la valeur actuelle de l’entreprise, près de 48 milliards de dollars (42,6 milliards d’euros). La Chan-Zuckerberg Initiative entend œuvrer dans les domaines de l’éducation, de la santé et, Facebook oblige, dans la mise en relation des hommes et des communautés.

« Les talents sont partout, mais pas les opportunités »

La fondation, qui n’a pas pris le statut d’une organisation caritative mais celui d’une société à responsabilité limitée, a procédé ce jeudi 16 juin à son premier investissement important, dans une entreprise new-yorkaise, Andela, consacrée à la formation en Afrique. Elle entend former des petits génies du logiciel sur des campus implantés au Nigeria et au Kenya. « Les talents sont partout, mais pas les opportunités. Nous voulons combler ce fossé », assure Mark Zuckerberg.

Ce faisant, il ne fait que tenter de répondre à un ­besoin bien concret, celui du manque d’ingénieurs dans la Silicon Valley. D’ailleurs Google a également investi dans Andela. Philanthropie bien ordonnée commence donc par soi-même. Situation étrange, où un milliardaire français, Xavier Niel (actionnaire du Monde), implante une école similaire, gratuite et sans diplôme exigé à l’entrée, au cœur de la Silicon Valley, quand les caïds du quartier partent chasser les mêmes talents en Afrique.

Acteur global

Le patron de Facebook a déjà investi son propre argent dans des projets éducatifs à destination des déshérités de la Silicon Valley, mais il est désormais un acteur global dont les rêves de croissance le portent en Chine, en Inde et en Afrique. Il est donc logique qu’il en fasse aussi le cœur de son action humanitaire.

A une époque où les pays riches se replient sur eux-mêmes et tentent de lutter contre les dégâts de la mondialisation, qui creusent le lit des populismes, les fortunes du numérique prétendent à l’universalité, bien au-delà de leurs propres affaires, avec des moyens supérieurs à ceux de la plupart des Etats. Une forme de captation de l’aide humanitaire par les grands marchands du XXIe siècle, qui préfèrent lutter contre la malaria au Congo ou fabriquer des ingénieurs au Kenya que payer des impôts qu’ils jugent mal utilisés. Ils poussent de ce fait à la redéfinition nécessaire du rôle des Etats dans un monde où ces derniers n’ont plus le monopole de l’intérêt général.