Des opposants à la loi travail, le 2 juin à Pierre-Benite. | ROBERT PRATTA / REUTERS

Ils ont promis un 14 juin « énorme », avec, pour objectif, le retrait de la loi travail. La journée de manifestation nationale, à Paris, organisée par les sept principaux syndicats – CGT, FO, FSU, Solidaires, UNEF, UNL et FIDL – s’annonce très forte. Le cortège partira vers 13 h 15 de la place d’Italie, pour rejoindre les Invalides.

De son côté, le Sénat a débuté, lundi, l’examen du projet de loi. Et la majorité de droite de la Haute Assemblée a bien l’intention d’en profiter pour déstabiliser l’exécutif.

  • La CGT veut trouver un second souffle

La CGT a fait le maximum pour mobiliser ses troupes, même si elle reconnaît qu’elle a « un problème avec les patrons de compagnies de cars, qui ne veulent pas mettre de véhicules à disposition pour les manifs ».

Il y a malgré tout peu de chances que les mobilisations atteignent les niveaux de la fronde de 2010 contre la réforme des retraites de Nicolas Sarkozy (entre 1 million et 3,5 millions de manifestants, selon les organisateurs, et entre 375 000 et 1,23 million selon la police), étant donné la volonté affichée par les contestataires de ne pas perturber l’Euro de football.

« Je ne suis pas sûr que bloquer l’accès au stade pour les supporteurs soit la meilleure image qu’on puisse donner de la CGT », avait déclaré Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, le 9 juin.

Les sept organisations contestataires ont déjà programmé deux nouvelles journées de mobilisation, les 23 et 28 juin. Mais, sur fond de mise en veilleuse des actions en cours, des tractations sont engagées pour trouver une porte de sortie avant que le débat revienne à l’Assemblée nationale, début juillet.

M. Martinez doit être reçu, pour la première fois depuis le début de la contestation, par la ministre du travail, Myriam El Khomri, vendredi 17 juin. Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière (FO), dont le syndicat a du mal à être visible derrière la CGT, a, pour sa part, prévenu : « On ne lâchera pas. »

  • Le Sénat, vitrine de l’opposition

Depuis lundi (et jusqu’au 24 juin), c’est au tour du Sénat d’examiner le très controversé projet de réforme du code du travail. Il avait été adopté par l’Assemblée nationale grâce à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, c’est-à-dire sans le soumettre au vote.

Si le Sénat dispose d’une marge de manœuvre pour figer certains articles, cette lecture devrait surtout faire office de vitrine pour l’opposition. A majorité de droite, il entend en effet donner un coup de barre libéral, à la veille d’une manifestation nationale contre le texte. Un vote solennel est programmé le 28 juin.

Loi travail : quelle est la marge de manœuvre du Sénat ?
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Le texte fera ensuite l’objet d’une commission mixte paritaire Assemblée nationale-Sénat chargée de trouver un accord. En cas d’échec, attendu, c’est la première des deux chambres qui aura le dernier mot. Le premier ministre, Manuel Valls, pourrait bien être tenté d’y utiliser à nouveau le 49.3.

Le Sénat va maintenir le principe contesté d’inversion de la hiérarchie des normes, avec primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche (article 2). Cette disposition, qui divise tant la gauche, a provoqué la colère de la CGT, catalyseur des grèves et manifestations qui secouent la France depuis plus de trois mois.

La droite entend notamment « faire sauter le verrou des 35 heures » :

« Ce que l’on veut, c’est que les salariés et les employeurs aient la faculté de se mettre d’accord ensemble sur le niveau de temps de travail dans la semaine, à la carte, en apportant des garanties pour que les salariés n’y perdent pas », résume le sénateur Jean-Baptiste Lemoyne (Les Républicains), corapporteur du texte.

De son côté, Manuel Valls dénonce une réécriture « ultralibérale », alors que l’exécutif mise sur les débats pour faire baisser la tension à gauche. Mme El Khomri a, elle, affirmé que le Sénat traitait le projet « pour ce qu’il est, c’est-à-dire une loi de gauche ».

  • 130 personnes interdites de manifestations

« Environ 130 personnes » seront interdites de participer, mardi à Paris, à la manifestation nationale. Selon le préfet de police de Paris, Michel Cadot, il s’agit de personnes déjà interpellées lors de précédents défilés contre le projet de loi de réforme du code du travail.

« Il n’est pas exclu qu’il y ait des casseurs qui commettent des exactions », a-t-il justifié, concédant qu’il s’agit d’une « mesure assez inhabituelle, assez massive », précisant que les personnes visées ont « fait l’objet soit d’un jugement », soit « d’une comparution judiciaire dans l’attente d’un jugement à venir » pour des dégradations ou violences lors de précédentes manifestations.

L’arrêté est valable pour mardi après-midi sur le parcours et aux abords de la manifestation entre la place d’Italie et les Invalides. Pour le défilé, une vingtaine d’unités de CRS et de gendarmes mobiles seront déployées, des contrôles préventifs et des fouilles effectués, a prévenu le préfet. Les voitures stationnées sur le parcours seront enlevées.

  • Le programme de la « Journée de mobilisation nationale »

Après huit journées de manifestations à travers la France, relayées par des blocages et des grèves touchant des secteurs clés comme les raffineries, la SNCF ou les déchets, les opposants n’entendent pas rendre les armes, ni changer leur mot d’ordre : le retrait d’un texte jugé trop favorable aux entreprises, et facteur de « régression sociale » pour les salariés.

La CGT a recensé plus de 600 cars affrétés dans toute la France, pour que les contestataires puissent rejoindre le rassemblement dans la capitale, où aucun match de l’Euro n’est programmé. Le cortège partira vers 13 h 15 de la place d’Italie, pour rejoindre les Invalides.

Le secteur de l’énergie devrait être à nouveau touché.

Du côté des déchets, le blocage de l’usine d’incinération d’Ivry-sur-Seine/Paris-13, depuis deux semaines, devrait se poursuivre.

Des taxis ont aussi prévu de se rassembler dès l’aube, porte Maillot à Paris, notamment à l’appel de SUD-taxis et de l’association Taxis de France.

Enfin, les pilotes d’Air France ont prévu une dernière journée de grève, mardi, même si ce mouvement est sans lien avec la loi travail.