La Pologne s’est qualifiée pour les huitièmes de finale de l’Euro 2016 en battant petitement une Ukraine maudite, au stade Vélodrome de Marseille (1-0). Un exploit personnel de Jakub Blaszczykowki, en début de seconde période, a suffi aux Polonais pour s’imposer face à des adversaires offensifs mais terriblement maladroits. La star polonaise Robert Lewandowski, elle, a encore traversé le match dans une totale discrétion. La Pologne, qui n’a toujours pas encaissé de but, défiera la Suisse à Saint-Etienne, samedi 25 juin. Les Ukrainiens, eux, quittent le tournoi avec un bilan catastrophique : trois défaites, aucun but marqué.

Ukraine-Pologne ou le duel des deux organisateurs de l’Euro 2012. Deux nations qui, depuis, ont connu des trajectoires opposées. Un parcours éclatant dans les poules qualificatives et un bon début de tournoi – victoire contre l’Irlande du Nord (1-0) et nul (0-0) contre l’Allemagne -, pour l’équipe du buteur Robert Lewandowski. Deux défaites face aux mêmes rivaux, quatre buts encaissés pour une Ukraine qui a visiblement la tête ailleurs, et notamment à la guerre qui a provoqué la partition du pays. « Le football n’est pas actuellement quelque chose de très important dans nos vies. On a une situation difficile dans notre pays » reconnaissait d’ailleurs, la veille du match, Mykhailo Fomenko, le sélectionneur, promettant toutefois « une réaction » de ses joueurs, pour leur dernière rencontre avant un retour programmé à la maison.

Domination ukrainienne

La promesse n’a pas été faite en l’air. La bonne volonté ukrainienne s’étale dès les premières minutes. Face à une Pologne, imperméable depuis le début du tournoi, mais qui a titularisé Fabianski dans ses buts pour suppléer un Szczesny, absent des entraînements depuis le début de la semaine, l’Ukraine se positionne haut. L’allant est louable mais dangereux : les deux premières occasions sont polonaises. Arkadiusz Milik, seul buteur de son pays depuis le début de l’Euro, mais aussi gâcheur en chef d’occasions, se présente seul à la 3e minute, après une talonnade géniale de Lewandowski. Son tir, déclenché du flanc gauche de la surface, rebondit sur la poitrine de l’excellent Pyatov, bien sorti. Une poignée de secondes plus tard, le joueur de l’Ajax Amsterdam rend la pareille à Lewandowski. Seul dans l’axe, le buteur du Bayern Munich expédie le ballon en direction du toit du Vélodrome. On ne le reverra plus jusqu’à la mi-temps – le joueur, pas le ballon -, si ce n’est pour provoquer le carton jaune de Kucher (37e).

La Pologne est presque qualifiée pour les huitièmes de finale, mais c’est clairement l’Ukraine qui domine. Au milieu de terrain, l’absence de Blaszczykowski, aux côtés du râtisseur Krychowiak, pénalise-t-elle son jeu ? En face, Yevhen Konoplyanka, coéquipier de Krychowiak au FC Séville, et Zinchenko, 19 ans seulement, s’installent, tranquilles, à la baguette. Ils lancent les flèches ukrainiennes Zozulya et Yarmolenko qui s’enfoncent, tour à tour, dans la défense polonaise et obligent Michal Pazdan à se jeter au sol pour contrer leurs tirs (8e). Traumatisée par les incidents d’Angleterre-Russie, Marseille a repoussé de deux jours sa fête de la musique par crainte de débordements autour du match… Les supporters polonais ne doivent pas être informés. Ils chantent d’une même voix et donnent l’impression à leurs joueurs d’évoluer à domicile. Leur enthousiasme fait plaisir à voir, mais il s’avère insuffisant. La première mi-temps est ukrainienne.

Comme la France face à la Suisse, la Pologne semble attendre le point du match nul et son ticket pour les 8e de finale en tant que deuxième du groupe. Elle recule dangereusement dans son camp et laisse la possession du ballon à un adversaire qui possède quelques beaux joueurs… A la 17e minute, Yarmolenko, l’attaquant du Dynamo Kiev, s’échappe encore mais ouvre trop son pied au moment de frapper. Konoplyanka, lui, prend tout son temps pour tirer dans le petit filet de Fabianski (29e). Et c’est encore l’ex-meneur de Donetsk qui est à la réception d’un centre en retrait de Butko, quelques minutes plus tard, mais le ballon, dévié par un pied polonais, lui file entre les jambes.

La Pologne est méconnaissable. Sa défense manque d’agressivité et ses attaquants, le jeune Bartosz Kapustka, 19 ans, dit « Petit chou », compris, attendent en vain des ballons négociables. La perspective d’une 8e de finale contre la Suisse suffit-elle à expliquer son peu de volonté ? Au retour des vestiaires, les Polonais ne semblent pas avoir trouvé une envie supplémentaire. Mais ils ramènent avec eux Blaszczykowski, le joueur de la Fiorentina aux 30 sélections, qui remplace Zielinski. Alors que Lewandowski, pataud comme depuis le début du tournoi, rate encore quelques contrôles, c’est bien Jakub Blaszczykowski qui va faire exploser le stade. Sur un corner, Milik lui glisse le ballon dans la surface. Le reste est limpide.

Les supporteurs polonais à Marseille. | ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP

La Pologne imperméable

Un crochet, un décalage, une frappe enroulée. Pyatov n’y peut rien et l’Ukraine plie encore contre le cours du jeu (1-0, 54e). Comme depuis le début de cet Euro pas si sécurisé que ça, des fumigènes célèbrent le but polonais et dans l’euphorie générale, l’équipe d’Adam Nawalka retrouve son allant du début de match. Kapustka, enfin sollicité, conclut un beau mouvement en triangle par un tir au ras du poteau de Pyatov. Hélas pour l’ailier polonais, et pour les amateurs de beaux joueurs, l’avertissement dont il hérite quelques minutes plus tard – son second du tournoi -, le prive du 8e de finale.

L’Ukraine est assommée mais comme l’a promis son sélectionneur, elle veut quitter le tournoi avec les honneurs. Elle tente encore et sur un long ballon, Zozulya remet de la tête pour Yarmolenko qui glisse à Konoplyanka, à l’entrée de la surface de réparation (62e). Mais le trio n’est pas plus efficace qu’en première période et Fabianski n’a même pas besoin de plonger. Le gardien polonais s’offre une petite frayeur à la 71e minute, quand, sur un cafouillage dans sa surface, Zinchenko semble bien seul au point de penalty. La reprise est ratée, et le tout jeune Zinchenko, 19 ans, quitte l’Euro sans avoir marqué, remplacé par Kovalenko, guère plus âgé, 20 ans (73e).

Pendant que l’Allemagne mène toujours devant l’Irlande du Nord, la Pologne recule encore et laisse à l’Ukraine les meilleures occasions. Une frappe du capitaine Rotan (82e), détournée par Fabianski, oblige le gardien polonais à se jeter dans les pieds de Yarmolenko. Zozulya, lui, arrive quelques dixièmes de seconde trop tard sur un débordement de Butko (86e). La malédiction ukrainienne est consommée. Le sélectionneur Mykhailo Fomenko, qui a annoncé sa retraite à l’issue de l’Euro, s’enfonce de plus en plus dans l’ombre du banc. La Pologne jouera contre la Suisse samedi 25 à Saint-Etienne. Elle continue sa route grâce à l’efficacité de sa défense qui n’a toujours pas encaissé le moindre but.