Nicolas Hulot, le 31 mars, à Nantes. | STEPHANE MAHE / REUTERS

Ira ? Ira pas ? Nicolas Hulot continue d’entretenir le suspense sur sa candidature à la présidentielle. En dix jours, le candidat malheureux à la primaire écologiste de 2011 s’est offert deux grands rendez-vous médiatiques. Une matinale avec Jean-Jacques Bourdin, le 3 juin, et une longue interview dans Libération lundi dans lesquelles il fait mine de se livrer sans toutefois dévoiler ses véritables intentions. Tout juste se contente-t-il de préciser son calendrier. « Je choisirai une option à l’automne et, qui sait, peut-être bien avant », indique-t-il au quotidien. Sur BFMTV et RMC, il avait déclaré qu’il annoncerait sa décision « avant la fin de l’année ».

L’écologiste se défend de tergiverser. « Ce n’est pas une hésitation, explique-t-il. C’est une réflexion et une instruction de l’opportunité d’un choix plutôt qu’un autre. » Traduction de l’un de ses proches, le député européen Pascal Durand : « C’est quelqu’un qui raisonne toujours pour savoir où il sera le plus utile pour faire avancer les idées auxquelles il croit. »

Visite discrète à Grande-Synthe

En attendant, une petite équipe gravite autour de lui : des politiques comme M. Durand, ex-patron d’Europe Ecologie - Les Verts, l’ancien parlementaire européen EELV Jean-Paul Besset, des intellectuels avec le philosophe Dominique Bourg, ou des vieux complices à l’instar de l’ex-patron du musée de l’air, Gérard Feldzer.

Depuis plusieurs mois, M. Hulot travaille également sur des thèmes qui lui sont moins familiers, comme celui de l’immigration. En mars, il s’est ainsi rendu dans le camp de réfugiés de Grande-Synthe (Pas-de-Calais) sans presse, ni caméras. Un mois plus tard, il publiait une tribune sur le sujet dans Le Monde, intitulée « Où est passée notre humanité ? » pour s’alarmer de « l’indifférence » vis-à-vis des migrants.

Dans Libération, il précise sa vision d’une nouvelle République avec un président du « long terme » qui concentrerait « moins de pouvoir ». Nicolas Hulot se dit ainsi favorable à « un mandat présidentiel plus long, non renouvelable » et imagine « une troisième chambre » : l’actuel Conseil économique, social et environnemental obtiendrait « un droit de veto suspensif sur toute mesure législative qui mettrait en cause le long terme ».

Quand il est testé dans les sondages, celui qui affiche une popularité insolente est crédité entre 9 et 11 % des intentions de vote. Dans son entourage, comme chez les écologistes, nombreux sont ceux qui le poussent à se présenter. « Je ne veux pas y aller par obligation, ni par pression, prévient M. Hulot. Tous ceux qui me mettent la pression savent que c’est contre-productif. »

Cécile Duflot lui laisserait la place

A EELV, il a réussi – chose rare – à mettre presque tout le monde d’accord. Vu les difficultés qu’affronte aujourd’hui la formation écologiste, même ses adversaires d’hier ne jurent plus que par lui. De David Cormand à Cécile Duflot, en passant par Noël Mamère ou Yannick Jadot, tous souhaitent qu’il se lance. Samedi lors de son congrès, EELV a rejeté l’idée d’une primaire de toute la gauche pour appeler à une candidature écolo en 2017 issue ou non de ses rangs.

Mme Duflot, qui ne cache pas ses ambitions présidentielles, a toujours assuré qu’elle lui laisserait la place s’il décidait d’être candidat. Samedi, lors d’un bref passage au congrès de son parti, la députée de Paris a promis qu’il n’y aurait pas « de déchirements » avec M. Hulot, jugeant que la primaire de 2011 avait été un « massacre ».

La primaire de 2011 a de toute façon vacciné M. Hulot, qui a répété qu’il ne serait pas le candidat d’un parti. Son calendrier commence cependant à embarrasser EELV. Le nouveau secrétaire national d’EELV, David Cormand, « hulotiste » de la première heure, ne s’en cache pas. « Si on attend la fin de l’année et qu’il n’y va pas, il n’y aura pas du tout de candidature écolo en 2017 », déclarait-il au Monde jeudi.

Si M. Cormand est bien conscient que « c’est [Nicolas Hulot] qui prend la décision », il juge que c’est aussi « une responsabilité qui le dépasse ». « Une candidature écolo portée par Nicolas Hulot, si on souhaite qu’elle soit victorieuse ne peut pas se faire sur quatre mois », estime-t-il.

Reste aussi à savoir si l’ancien envoyé spécial de François Hollande pour la protection de la planète acceptera de se confronter au chef de l’Etat si ce dernier était candidat, au risque d’être accusé d’avoir fait perdre la gauche. Dans Libération, M. Hulot botte en touche : « Pour l’instant, je ne suis pas candidat. Lui non plus. Ce qui prime, c’est ce que chacun peut apporter pour que la France aille mieux. »

Au PS, où l’on a intérêt à réduire la concurrence à gauche en 2017, on surveille ses déclarations avec attention. Lundi, le premier secrétaire du parti, Jean-Christophe Cambadélis, s’est dit prêt « à discuter avec M. Hulot ». Lequel incarne, selon lui, un débat « sûrement plus productif » que celui porté par Mme Duflot qui défend « une écologie punitive du Parti socialiste ».