Le Norvégien Magnus Carlsen, en 2013. | Frans Peeters.

Il n’y a pas que le foot dans la vie… Alors que s’ouvre en France, vendredi 10 juin, l’Euro 2016, qui fera la fortune des brasseurs et des livreurs de pizzas, une autre compétition, d’un genre très différent, se tient du 9 au 12 juin à Paris. Pas de stade immense rempli de supporteurs braillards et survoltés, mais un lieu intimiste (la Maison de la chimie, dans le 7e arrondissement) où les spectateurs se permettront à peine de chuchoter. Et, dans l’« arène », pas de pousseurs de baballe, mais des pousseurs de bois.

Pour la première fois depuis une vingtaine d’années, le gratin du jeu d’échecs a rendez-vous à Paris pour la première étape du Grand Chess Tour 2016, variante échiquéenne des tournois du Grand Chelem au tennis. Les organisateurs de la compétition ont choisi une formule assez attractive, puisque aucune partie ne se déroulera sur le rythme classique qui donne des rencontres pouvant durer quatre ou cinq heures.

Les 9 et 10 juin, les dix joueurs engagés s’affronteront selon une cadence dite « rapide » : chacun dispose de 25 minutes pour jouer tous ses coups, capital de temps auquel s’ajoutent 10 secondes par coup. Et le rythme s’accélérera ce week-end, puisque les participants se rencontreront tous deux fois dans des blitz, la forme la plus effrénée et la plus spectaculaire du jeu (5 minutes par joueur et un incrément de 2 secondes à chaque coup), où la pendule joue un rôle prépondérant.

Vague montante

Sur les dix joueurs invités, huit font partie du top 10 planétaire, à commencer par le Norvégien Magnus Carlsen, 24 ans, champion du monde depuis 2013 et qui a remporté le Grand Chess Tour en 2015. Seront aussi présents le Russe et ancien tenant du titre Vladimir Kramnik (numéro 2 mondial), l’Italo-Américain Fabiano Caruana (numéro 3), l’Arménien Lévon Aronian (numéro 4), le numéro 1 français Maxime Vachier-Lagrave (numéro 5 mondial), l’Américain Hikaru Nakamura (numéro 6), le Néerlandais Anish Giri (numéro 8) et le Philippin Wesley So (numéro 10), qui joue sous drapeau américain. Compléteront ce plateau très relevé le Bulgare Vesséline Topalov (numéro 13) et le Français Laurent Fressinet (numéro 50). Le grand absent de cette compétition est le Russe Sergueï Kariakine (numéro 9), en pleine préparation pour le match de championnat du monde qui l’opposera en novembre à Magnus Carlsen.

Cette liste de noms évoque sans doute peu de chose au grand public, car, même si les règles du jeu sont connues de beaucoup, les échecs demeurent un sport confidentiel. Néanmoins cette énumération permet de constater à quel point le noble jeu a changé de visage en quelques années : la domination outrancière des champions venus des ex-pays de l’Est est bel et bien terminée ; en témoigne la pyramide des âges des joueurs qui seront présents à Paris. Le Russe (Kramnik), le Bulgare (Topalov) et l’Arménien (Aronian) sont en effet les plus vieux des compétiteurs, tandis que les joueurs de la vague montante – les Carlsen, Caruana, Vachier-Lagrave, Giri ou So – sont tous des enfants des années 1990… Ils sont les Karpov et Kasparov d’aujourd’hui et de demain.

La seule chose qui n’ait pas changé est l’hégémonie masculine : selon le dernier classement de la Fédération internationale des échecs, publié au début de juin, la meilleure joueuse actuelle, la Chinoise Hou Yifan, pointe à la 83e place mondiale. Pour cette étape parisienne du Grand Chess Tour, il n’y aura donc pas plus de femmes devant l’échiquier que sur les terrains de football de l’Euro…