Carlos Ghosn, à Yokohama, au Japon, le 12 mai | THOMAS PETER / REUTERS

Carlos Ghosn est-il un PDG à « mi-temps » chez Renault ? Et, à ce titre, peut-il réellement être rémunéré à hauteur de 7,2 millions d’euros pour l’année 2015 ? Le 29 avril, 54 % des actionnaires ont rejeté la rémunération du dirigeant franco-brésilien. Mais le conseil d’administration n’avait pas tenu compte du vote et validé la rémunération dans les heures suivant l’assemblée générale.

Cela n’a pas plu du tout au Haut comité du gouvernement d’entreprise (HCGE), chargé du code de bonne gouvernance AFEP-Medef et émanation du patronat français. Il a donc exprimé ses griefs dans un courrier confidentiel, révélé jeudi 26 mai par Les Echos.

Les sages du haut comité ne remettent pas en cause en tant que telle la structure de la rémunération du dirigeant de Renault, ni la transparence des éléments qui la définissent. Cependant, ils estiment qu’il n’y avait pas de raison que le conseil d’administration valide, dans la même journée, la rémunération pourtant refusée par les actionnaires. Celui-ci aurait dû expliquer de suite comment il comptait faire évoluer la rémunération. Ce qu’il n’a pas fait.

Quinze millions d’euros par an

Mais le vrai problème, pour le HCGE, c’est la « mesure » de la rémunération : les 7,2 millions d’euros alloués par le constructeur à son dirigeant n’apparaissent pas justifiés. Et ce, alors que Carlos Ghosn émarge également à hauteur de quelque 8 millions d’euros par an chez Nissan dans le même temps.

Dans sa lettre, le HCGE indique : « Ou bien Renault et Nissan sont effectivement deux grandes entreprises autonomes et, dans ce cas, il faudrait justifier soigneusement comment, en termes de disponibilité, la direction générale peut être exercée par une seule personne et écarter la critique de certains observateurs qui considèrent que la rémunération très élevée dans le cadre de Renault correspond à une fonction à “mi-temps”. »

« Ou bien, compte tenu de la proportion des actifs et de la contribution aux résultats de Renault représentées par cette participation, la performance du dirigeant de Renault est indissociable de celle du président de Nissan et le conseil d’administration du premier doit raisonner sur l’ensemble des deux fonctions, en termes de rémunération et d’appréciation de la performance du dirigeant », poursuivent les membres du HCGE.

Présenter des évolutions

Dans ce dernier cas, les actionnaires de Renault devraient pouvoir « disposer d’informations détaillées sur la rémunération au titre de Nissan, et sur les mécanismes incitatifs qu’elle comporte, pour se prononcer en toute connaissance de cause » sur la rémunération globale de Carlos Ghosn.

Lors du bras de fer entre l’Etat et Carlos Ghosn autour de la montée surprise du premier au capital de Renault, cette question de la double rémunération était apparue en toile de fond comme l’un des problèmes principaux.

Pour le HCGE, l’urgent est désormais que le conseil d’administration du constructeur se réunisse dans les prochaines semaines pour présenter des évolutions « significatives » de la rémunération du PDG de Renault dans le « sens des observations » du Haut comité.

Pour y parvenir, les sages demandent au conseil d’administration de consulter les actionnaires, notamment « ceux dont on sait qu’ils ont voté contre la résolution du say on pay ». L’Etat en premier lieu.