Un visiteur de l’E3 s’essaie à la réalité virtuelle sur le stand de Sony. | LUCY NICHOLSON / REUTERS

4K, VR, NX… Il a beaucoup été question d’acronymes durant le salon du jeu vidéo de l’Electronic Entertainment Exposition (E3), qui s’est tenu du 14 au 16 juin à Los Angeles. Mais le mystère plane toujours sur leur potentiel commercial, voire sur leur nature même.

Plus de résolution, plus de puissance

La 4K, cette dénomination commerciale pour le nouvel écosystème télévisuel ultra haute définition, semble la plus avancée. Sony et Microsoft ont annoncé le lancement l’an prochain de nouveaux modèles de leurs consoles respectives à la puissance accrue, afin de faire tourner les jeux dans une résolution supérieure : la PlayStation 4K Neo d’un côté, la Project Scorpio de l’autre. Mais ni l’une ni l’autre n’ont été montrées, et rien n’atteste que les consommateurs seront prêts à repasser à la caisse quatre ans après le lancement de la PlayStation 4 et la Xbox One pour une simple mise à niveau.

Pour les constructeurs, l’intérêt est évident : surfer sur la vague de la 4K, qui n’équipait qu’1 % des foyers américains en 2014, et qui serait présente dans un foyer sur deux à l’horizon 2020, selon les prédictions de Statistics Analytics. Sur la précédente génération, Sony et Microsoft avaient opté pour la stratégie inverse, intégrer la haute définition à leurs machines, avant même sa démocratisation chez les particuliers, avec pour conséquences des ventes inhabituellement basses pour leurs consoles durant les premières années.

Interrogations autour des casques

La VR (réalité virtuelle) a déjà une existence commerciale, entre l’ouverture des commandes pour le casque Oculus Rift et les modèles d’entrée de gamme commercialisés sous la gamme Gears VR. Mais c’est véritablement avec le lancement du PlayStation VR de Sony, à l’automne 2016, que ce concept technologique si médiatique sera enfin confronté au bain du grand public… avec le risque de déchanter. « En toute honnêteté, j’ai l’impression qu’il y a une légère surchauffe », prévenait en avril David Ranyard, ancien de Sony Londres, évoquant le risque d’une déconvenue pour certains studios.

Dans l’industrie, le potentiel commercial de ces périphériques divise. « À mon sens, la réalité virtuelle n’est pas tout à fait adaptée pour les utilisations grand public, à grande échelle, et dans lesquelles les consommateurs peuvent s’investir longtemps au lieu de picorer », a de son côté écarté Reginald Fils-Aimé, le président de Nintendo of America, dans un entretien à Bloomberg. Microsoft a joué de prudence en annonçant que sa Project Scorpio serait « prête pour la réalité virtuelle », mais sans annoncer concrètement de casque pour aller avec. La firme américaine se ménage la possibilité de s’en désintéresser si les ventes de casques ne suivent pas, tout en gardant la porte ouverte. « La VR, c’est comme le pari de Pascal. On n’a rien à perdre à y croire », confie avec prudence Hugues Ouvrard, président de Xbox France.

Nintendo, le facteur imprévisible

Loin des tendances annoncées de longue date et dont l’industrie n’attend plus que le décollage commercial, la NX de Nintendo fait figure de mystère absolu. Sauf à considérer que les fuites évoquant une console portable connectable à un téléviseur soient aussi avérées que celles sur la PlayStation Neo et la Project Scorpio.

Officiellement en tout cas, le constructeur japonais ne dévoilera rien de sa nouvelle console avant l’automne 2016, mais comme à l’accoutumée, elle ne devrait pas rentrer dans la course à la puissance dans laquelle se sont engagés Sony et Microsoft. « Pour nous, ce ne sont pas les caractéristiques techniques [qui comptent], pas les téraflops, pas la voilure d’un système donné, mais le contenu. […] Donc peu importe ce que font Microsoft et Sony dans leur communication sur des nouveaux systèmes, qu’ils se battent dans l’océan rouge, ça les regarde. »

De la NX, Nintendo ne dira pas plus. Le constructeur, qui n’a jamais semblé aussi affaibli, garde malgré tout un savoir-faire et une capacité d’innovation qui suscitent la vigilance des autres acteurs. « On ne compte plus les fois où tout le monde les enterrait et où ils sont revenus d’entre les morts, rappelle Hugues Ouvrard. Nintendo, c’est les “Walking Dead” du jeu vidéo. On est obligé de les avoir toujours dans le radar, parce qu’on ne sait jamais de quoi ils sont capables. Ce sont des génies. » En 2006, alors que tout le monde pariait unanimement sur la HD, Nintendo misait à la surprise générale sur la reconnaissance de mouvements avec la Wii. Quatre ans plus tard, Sony et Microsoft sortaient des périphériques similaires pour prendre en marche, tant bien que mal, un train que personne n’avait vu arriver.