François Baroin, président de l’AMF, devant les maires français, le 31 mai 2016. | JOEL SAGET / AFP

Comment remédier à la pénurie de médecins que connaissent aujourd’hui des centaines de communes en France ? L’Association des maires de France (AMF) a jugé cette question de l’accès aux soins suffisamment préoccupante pour en faire « le thème numéro un » du débat d’ouverture de son 99e congrès, mardi 31 mai, à Paris. « Il n’y a aujourd’hui pas un département de France, pas un canton, pas un chef-lieu de canton qui n’a des problèmes pour trouver un remplacement de médecin de campagne », a fait valoir François Baroin, le maire (LR) de Troyes et président de l’AMF, en soulignant que les villes moyennes au nord de la Loire commençaient également à être touchées.

« L’Etat n’a pas été capable d’anticiper la catastrophe et aujourd’hui aucun territoire du pays n’est à l’abri », a abondé Patrick Bouet, le président de l’Ordre national des médecins, qui a appelé à « changer de modèle organisationnel ». « Il n’y aura plus forcément un médecin à demeure dans chaque territoire », a-t-il mis en garde. Près de 2,5 millions de Français vivent dans un désert médical, avait annoncé l’Ordre en novembre, lors de la publication de ses atlas régionaux de la démographie médicale.

Dans les 192 zones recensées, qui rassemblent 2 378 « bassins de vie », les médecins qui partent à la retraite peinent à trouver un remplaçant. Ceux encore en activité connaissent des journées à rallonge et doivent refuser de nouveaux patients. A Montceau-les-Mines par exemple, une commune de 19 000 habitants en Saône-et-Loire, 8 000 personnes se retrouvent aujourd’hui sans médecin référent.

Une aide à l’installation des médecins

Pour certains élus locaux, trouver un successeur au médecin qui part à la retraite peut vite tourner au casse-tête. « C’est un phénomène qui nous submerge », a reconnu Isabelle Maincion, maire de La Ville-aux-Clercs (Loire-et-Cher) et coprésidente du groupe de travail santé à l’AMF. « Cette désertification médicale devient une vraie catastrophe », a lancé depuis la salle Luc Bouard, le maire de La Roche-sur-Yon (52 000 habitants, Vendée). « Nous attirons beaucoup de nouveaux habitants mais pas de nouveaux médecins. Il faut être plus pragmatique. Ce n’est pas aux communes de verser une prime pour l’aide à l’installation, c’est à l’Etat de le faire. » La récente proposition de l’Assurance-maladie de verser une somme forfaitaire de 50 000 euros aux médecins s’installant dans les déserts médicaux illustre pourtant les démarches entreprises par les pouvoirs publics dans le domaine.

Numerus clausus longtemps insuffisant, refus d’être éloigné d’un centre urbain, aspirations des jeunes médecins à exercer différemment de leurs aînés… Les causes de la pénurie sont connues. « Ce qui prime, c’est la qualité de vie professionnelle et personnelle » des jeunes professionnels de santé, a souligné Pierre de Haas, le président de la Fédération française des maisons et pôles de santé (FMMPS). Ces structures, dans lesquelles les praticiens libéraux peuvent exercer à plusieurs aux côtés d’autres professionnels de santé, ont connu un important développement ces dernières années. Au nombre de 174 en 2012, la France en compte désormais plus de 800 et le seuil de 1 400 pourrait être franchi en 2018, a récemment annoncé le premier ministre, Manuel Valls.

Outre ces maisons de santé pluridisciplinaire, pour lesquelles les élus n’arrivent cependant pas toujours à trouver des candidats, d’autres solutions ont été évoquées mardi matin. « Il faut bricoler des projets au plus près du terrain », a revendiqué un maire. Marie-Louise Fort, la maire (LR) de Sens, dans l’Yonne, a ainsi raconté comment les praticiens de SOS-Médecins étaient devenus dans sa ville, à titre expérimental, les médecins référents des personnes âgées qui en étaient dépourvus. Après avoir longtemps cherché à attirer des médecins libéraux, Pierre Polard, le maire de Capestang, dans l’Hérault, a raconté qu’il avait trouvé « en trois mois » des médecins prêts à venir travailler comme salariés dans le centre municipal de santé créé par la commune. « Ce mode d’exercice convient aux attentes des médecins », a-t-il expliqué, estimant que « les pouvoirs publics devraient accompagner ces démarches. »