Philippe Cassard dans le cadre de son émission. | Christine Augé

Après dix saisons et 432 « Notes du traducteur », Philippe Cassard propose depuis la rentrée des « Portraits de famille ». Un changement désiré par le pianiste et homme de radio. « Je n’aime pas quand les choses ronronnent et là, j’avais le sentiment d’avoir fait le tour », explique-t-il. Ainsi, on le retrouve chaque samedi matin pour deux heures plus intimistes, exceptionnellement parfois en présence du public, comme le 21 mai, où il reçoit le pianiste portugais Artur Pizarro.

Après avoir décortiqué pendant dix ans des œuvres, Philippe Cassard s’intéresse désormais aux interprètes, essentiellement des pianistes, mais aussi à quelques chanteurs, violonistes ou chefs d’orchestre, morts ou vivants. Souvent, il en profite pour mettre en lumière des artistes injustement boudés par le microcosme musical français. Ces « coups de cœur » l’amènent à faire des choix inattendus. En préparant plusieurs émissions sur les pianistes hongrois, il a ainsi redécouvert Annie Fischer, qu’il avait vue une fois en concert dans les années 1980. De cette pianiste, renommée pour ses interprétations de Mozart, Beethoven, Schubert ou Béla Bartok, Philippe Cassard avait gardé le souvenir d’une vieille dame qui tapait sur son instrument et « en foutait plein à côté ».

Le producteur n’a pas sa langue dans sa poche, il se garde d’être critique à l’antenne. « Il s’agit d’un petit exercice d’admiration qui se veut prescripteur. Il m’arrive parfois, par une antiphrase ou une métaphore, de signaler des choses que je n’aime pas, mais cela n’intéresse personne », estime-t-il.

« Les grands virtuoses d’aujourd’hui sont tout aussi exceptionnels que ceux d’hier. Quand on enregistrait jadis, on prenait beaucoup de risques car on ne faisait qu’une prise. Maintenant, on peut tricher. »

Il ne verse ni dans la nostalgie ni dans la fascination des prodiges d’aujourd’hui. « Les grands virtuoses d’aujourd’hui sont tout aussi exceptionnels que ceux d’hier. Quand on enregistrait jadis, on prenait beaucoup de risques car on ne faisait qu’une prise. Aujourd’hui, on peut réaliser jusqu’à 15 points de montage sur quelques secondes de musique. Avant le numérique, les amateurs et les médiocres avaient une vie professionnelle très courte. Maintenant, on peut tricher en faisant des disques sans passer forcément par la case concert où se trouve la vérité des choses », observe-t-il.

Enfant de la radio

Ce pianiste, réputé pour ses interprétations de Franz Schubert et particulièrement de Claude Debussy, à qui il vient de consacrer un album entier, a fait de la radio, depuis une vingtaine d’années, sa « danseuse ». « Je suis un enfant de la radio car, chez moi, nous n’avions pasla télévision. A l’époque, en cachette de mes parents, lorsque je rentrais du Conservatoire de Paris, j’allais assister aux émissions publiques d’Europe 1, notamment celle de Pierre Bellemare. »

La radio est aussi pour lui une manière de faire de la pédagogie sans avoir d’élève. « Je ne donne quasiment pas de cours, car je n’aime pas l’idée de répétition, d’aller toutes les semaines dans une institution pour donner des leçons. Je suis d’un naturel assez impatient et l’idée de construire quelque chose avec un jeune musicien me fait très peur. Je ne m’en sens pas capable », concède-t-il.

Invité dès le milieu des années 1980 à venir interpréter des œuvres, Philippe Cassard est devenu, ces dernières années, une des figures importantes de France Musique. Chaque samedi, il réunit 188 000 auditeurs. Ses « Portraits de famille » ont été téléchargés près de 9 500 fois en mars (soit une progression de 14 % par rapport à février). Une deuxième saison est déjà prévue à la rentrée.

« Portraits de famille », tous les samedis, de 9 heures à 11 heures, sur France Musique.