Les premiers résultats montrent que Bernie Sanders est battu (de quelque 12 points) par Hillary Clinton jusque dans le fief ultra-progressiste de San Francisco, où il avait réuni plus de 10 000 fidèles pour un méga-concert deux jours avant le scrutin. | Cliff Owen / AP

S’il a perdu aussi nettement les primaires en Californie, Bernie Sanders peut, selon les premières analyses, blâmer les moins de 35 ans. Lui qui se flatte d’avoir amené des millions de jeunes Américains à prendre part au processus politique, ne semble pas avoir réussi son pari en Californie.

Deux jours après le vote du 7 juin dans cet Etat, les résultats, non définitifs, donnaient plus de 400 000 voix d’avance à Hillary Clinton, soit 55,8 % des votes. Un écart très supérieur à ce que laissaient prévoir les sondages dans les deux dernières semaines de campagne.

Porté par l’inscription d’un nombre record de nouveaux électeurs sur les listes (2,3 millions depuis janvier, dont plus d’un million de jeunes de moins de 35 ans), Bernie Sanders était lui-même optimiste. Mais, ajoutait-il systématiquement, tout « dépend (ra) de la participation ».

Le sénateur avait raison. Les experts avaient envisagé que quelque 8 millions d’électeurs participent aux primaires, soit un taux de 32 %. Vingt-quatre heures après le scrutin, la participation s’établissait à 24 % seulement, soit moins qu’en 2008.

Devancé, même à san Francisco

Le dépouillement des bulletins par correspondance - ils pouvaient être postés jusqu’à la date du 7 juin - ne sera pas terminé avant une semaine, mais il ne devrait modifier ce taux de manière significative.

Mme Clinton a obtenu quelque 700 000 voix de moins qu’en 2008 contre Barack Obama. Bernie Sanders, 600 000 de moins que l’actuel président.

Sur le perron de la Maison Blanche, jeudi 9 juin, Bernie Sanders s’est lui-même interrogé sur le décalage entre pronostics et réalité. Il a indiqué attendre avec impatience les résultats définitifs. « Je m’attends à ce que l’écart se réduise », a-t-il indiqué.

Mais les premiers résultats montrent qu’il est battu (de quelque 12 points) par Mme Clinton jusque dans le fief ultra-progressiste de San Francisco, où il avait réuni plus de 10 000 fidèles pour un méga-concert deux jours avant le scrutin.

Comme prévu, l’ex-first Lady a, elle, enregistré ses plus gros scores dans la région de Los Angeles, et dans les circonscriptions où les Latinos sont fortement représentés. M. Sanders ne la devance que dans les zones de Californie du Nord où son message sur l’environnement, plus « vert » que celui de sa rivale, a peut-être résonné davantage.

Manque d’expérience

Pourquoi un tel décalage ? Certains experts mettent en cause la décision de l’agence AP d’annoncer - moins de 24 heures avant l’ouverture des bureaux de vote - que l’ex-secrétaire d’Etat avait atteint le nombre de délégués nécessaire à l’investiture. Cette nouvelle aurait démobilisé les électeurs. Mais plus de 5 millions de bulletins de vote avaient déjà été postés avant cette annonce.

Selon une analyse du sondeur Paul Mitchell, portant sur 21 000 votes par correspondance, les jeunes sont plutôt à blâmer. Dans cet échantillon, 68 % des votants étaient âgés de plus de 55 ans, un électorat penchant plutôt vers Mme Clinton. Seuls 10 % d’entre eux avaient moins de 35 ans.

Les experts mettent en avant le manque d’expérience des nouveaux inscrits, face à un bulletin compliqué, comportant 34 noms de candidats au sénat local, et une demi-douzaine de référendums spécifiques. Le processus était particulièrement retors pour les électeurs indépendants, qui devaient renvoyer un premier bulletin avant le 23 mai, pour réclamer de pouvoir participer, dans un deuxième temps, à la primaire démocrate du 7 juin.

Deux semaines dans l’Etat

La plupart des sondages avaient donné les deux concurrents pratiquement à égalité dans la dernière ligne droite. Certains analystes annonçaient une « vague » pro-Bernie à la mesure de la taille de ses meetings.

Le candidat a pratiquement campé deux semaines dans l’Etat, allant de visites aux ouvriers agricoles de la Vallée centrale aux interventions dans les églises noires d’Oakland. Au point que l’ex-secrétaire d’Etat était revenue du New Jersey pour maintenir la mobilisation en Californie.

Dans les cinq derniers jours de campagne, le couple Clinton a tenu 43 réunions. Des milliers de militants et de syndicalistes ont passé des coups de fils pressant les électeurs de mettre sans attendre leurs bulletins à la poste.

La mobilisation de la « Clinton machine », doublée de celle de l’appareil du parti, majoritairement du côté de l’ex-secrétaire d’Etat, semble avoir payé. Une efficacité qui sera essentielle le 8 novembre dans les « swing states », les Etats qui oscillent d’un côté ou de l’autre selon les années.