En bloquant les raffineries depuis vendredi 20 mai, les militants CGT opposés à la loi sur la réforme du code du travail font planer un risque de pénurie de carburant, ce que le gouvernement a plusieurs fois démenti.

Le secrétaire d’Etat aux transports, Alain Vidalies, a assuré, dimanche 22 mai sur Europe 1, qu’en dernier recours, le gouvernement pouvait décider de puiser dans les stocks stratégiques pour alimenter les stations-service.

Qui s’occupe de ces stocks et en quelles circonstances sont-ils utilisés ?

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  • Que représentent les stocks stratégiques ?

Adhérente depuis 1992 à l’Agence internationale de l’énergie (AIE), créée après le choc pétrolier de 1973-1974, la France a l’obligation de constituer des stocks de pétrole pour faire face à une éventuelle pénurie. Selon Alain Vidalies, ces réserves, « auxquelles nous n’avons pas touché pour l’instant, […] permettent à la France d’avoir plusieurs semaines, de nombreuses semaines de consommation devant elle. »

Ces stocks correspondent plus précisément à « quatre-vingt-dix jours d’importations journalières moyennes nettes ou soixante et un jours de consommation intérieure journalière moyenne », selon le site du ministère de l’environnement. « Cela représente environ trois mois de consommation moyenne calculée sur l’année précédente », estime, de son côté, l’Union française des industries pétrolières (UFIP).

La Société anonyme de gestion de stocks de sécurité (Sagess), qui a pour mission de constituer et de conserver ces stocks, explique dans une brochure qu’ils représentaient 13,7 millions de tonnes d’hydrocarbures en 2015, qui se répartissent ainsi : 45 % de gazole, 33 % de brut, 9 % de fuel domestique, 7 % d’essence et 6 % de carburéacteurs.

  • Où sont entreposées ces réserves ?

Les principaux sites de stockage. | SAGESS

La gestion des stocks stratégiques est assurée par quatre acteurs : l’Etat, le Comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers (CPSSP), la Sagess (chargée depuis 1988 de la gestion opérationnelle de la mission du CPSSP) et les opérateurs pétroliers.

Les hydrocarbures sont entreposés dans les quatre-vingt-douze sites de stockage à usage civil qui maillent le territoire. La France est divisée en sept grandes zones administratives, et l’objectif est de « disposer de dix jours de supercarburant et de quinze jours en gazole et fioul domestique par zone de défense », selon le ministère de l’environnement, qui concède qu’il est difficile de le tenir dans certains cas.

Le plus important dépôt se trouve près de Manosque, dans les Alpes-de-Haute-Provence. Il est relié par un pipeline de 130 kilomètres au nœud stratégique de Fos Lavéra (Bouches-du-Rhône), qui dessert les raffineries voisines de l’étang de Berre, mais aussi les oléoducs qui alimentent celles de Feyzin (Rhône), de Cressier, en Suisse, et de Karlsruhe, en Allemagne.

  • Quand ces stocks sont-ils utilisés ?

Le recours aux stocks stratégiques s’effectue « en cas de rupture grave des approvisionnements (crise pétrolière internationale, grève de la navigation, boycott politique, catastrophes naturelles, événements climatiques, voire imprévoyance dans la gestion des exportations de certains pays) », explique le ministère du développement durable.

Avant d’avoir recours à ce dispositif, plusieurs mesures peuvent être prises. A l’heure actuelle, plusieurs préfectures ont notamment ordonné le rationnement ou l’interdiction de stockage de carburant. Des arrêtés ont également été pris par le gouvernement pour autoriser les camions de carburant à circuler le week-end du 21 et 22 mai.

Les autorités ont aussi procédé au déblocage par la force de certains dépôts de carburant occupés par des militants CGT. Le gouvernement peut également décider de faire davantage appel à l’importation d’hydrocarbures.

  • Quels sont les précédents ?

C’est à l’automne 2010, lors des grèves contre la réforme des retraites, que le gouvernement a, pour la dernière fois, puisé dans les stocks stratégiques. Avant cela, le précédent recours remontait à 2005, dans les semaines qui suivirent l’ouragan Katrina, quand des plates-formes pétrolières avaient été endommagées.