Pour Caroline Bloch, DRH chez Microsoft France, «  Les salariés doivent être capables de travailler beaucoup plus collectivement » (Photo: le siège de Microsoft à Issy-les-Moulineaux en avril). | CHARLES PLATIAU / REUTERS

Pourquoi Microsoft va transformer son management ?

Caroline Bloch. – Auparavant, le « business model » était construit sur la vente de logiciels. Il y a des années, c’était avec des petites disquettes, ensuite ça s’est dématérialisé. Aujourd’hui pour être compétitif il ne suffit plus de vendre un certain nombre de produits différents, mais il faut proposer au client une solution qui fait croître son business encore plus qu’avant. Microsoft va vendre des solutions ad hoc pour chaque client. Ce qui va compter, c’est que nos clients les consomment, puisqu’on ne va pas les acheter de la même façon qu’auparavant.

Le fait d’aller vendre des solutions construites « sur mesure » signifie qu’en interne on doit transformer nos compétences, notre mode de management et notre culture. Essentiellement, chez Microsoft, il y a des commerciaux, des consultants, etc. Pour proposer des solutions de cette nature, ce n’est plus tout à fait la même chose que de dire « voici mes outils et mes applications ». Les salariés doivent être capables de travailler beaucoup plus collectivement.

Par exemple, le responsable commercial doit comprendre la problématique du directeur marketing, du directeur financier. Il doit développer une capacité d’écoute active, de compréhension du business encore plus importante qu’avant pour vendre la solution qui réponde exactement à la problématique client.

Concrètement qu’est-ce que ça change pour les salariés ?

Nos collaborateurs doivent être capables de faire deux choses : proposer de nouvelles offres ; et pour construire ces offres, en interne, ils doivent avoir une capacité à travailler de façon collective beaucoup plus importante qu’avant. De retour de chez le client, le responsable commercial devra en effet constituer une équipe transversale : revente, support technique, consultant, responsable financier, etc.

Les différents métiers doivent se transformer pour s’adapter à cette organisation nouvelle pour favoriser la coopération. Chacun devra appartenir en permanence à différents groupes d’expertise (« learning circle »). Les équipes multidisciplinaires apportent des solutions complexes, mieux personnalisées pour chaque client.

Le rôle des manageurs de proximité va-t-il changer ?

Ils ont un devoir de curiosité et de transversalité systématique. Dans l’entreprise il y a toujours eu de l’individuel et du collectif. La nouveauté est de demander à chacun de produire du collectif.

Quand un ingénieur support a trouvé une solution pour un client, par exemple, il l’enregistre sur une base de données partagée. Il est possible que des collègues aient des requêtes de même nature chez différents clients. Ce qu’on demande à tout le monde c’est de partager les données pour gagner en agilité et faire des propositions qui pourront être construites plus facilement et plus rapidement.

Le manageur a pour mission de générer de la collaboration. Il va inciter ses collaborateurs à faire le lien avec les autres équipes. Il doit avoir établi de bonnes relations avec chaque organisation pour être capable de faciliter le contact et indiquer quelles sont les bonnes personnes à associer selon la problématique abordée pour concevoir l’offre la plus innovante. Ceux qui seront les plus efficaces sont ceux qui auront su faire les bonnes connections.

Pour mettre l’accent sur ces comportements collaboratifs, la performance des salariés est évaluée à la fois sur la capacité à réunir des collaborateurs, sur la réponse aux sollicitations, sur la façon dont le salarié participe et sur la réalisation des objectifs. Il faut avoir le réflexe développement : je teste et j’apprends. Pour faciliter l’autonomie, il faut donner la possibilité de prendre des risques et donc définir le risque autorisé. Mais in fine, c’est la posture « auto-apprenant en collectif » qu’il faut faire atterrir dans l’organisation.