Peu importe l’origine géographique, toute personne qui le souhaite peut envoyer au musée un objet issu d’une relation passée. | Romain Geoffroy / "Le Monde"

Et si faire son entrée au musée pouvait aider à se débarrasser d’une déprime post-rupture ? Le musée des relations rompues, qui vient d’ouvrir ses portes à Los Angeles le 4 juin, y croit en partie. Petit frère du musée ouvert en 2006 à Zagreb, en Croatie, ce « Museum of Broken Relationships » installé sur le clinquant Hollywood Boulevard expose toutes sortes d’objets ayant trait à une relation passée. L’originalité du concept tient dans le fait que l’ensemble des artefacts de la collection a été donné par des amants éconduits.

La visite peut parfois être déprimante, mais s’avère riche en histoires, de celles qui finissent en larmes à celles teintées d’humour. Les œuvres sont entreposées comme dans n’importe quel musée, à côté d’une légende écrite anonymement par l’ancien amant, qui y précise la date de début et de fin de la relation. L’un des objectifs de l’exposition : que le visiteur se rende compte que toutes les relations sont différentes, mais aussi à quel point les ruptures se ressemblent. « On est tous passés par là, commente Alexis Hyde, directrice du musée. Quand on est au fond du trou après une séparation, on se dit qu’on n’a jamais autant souffert et que personne n’a jamais vécu ça. Or, ici justement, on s’aperçoit qu’on est loin d’être les seuls. »

Des objets de tous les jours, parfois sans grand intérêt visuel, mais qui, une fois la légende lue, retrouvent toute leur valeur sentimentale. On y trouve notamment une clé d’appartement jamais rendue, des poèmes inachevés, un fer utilisé pour repasser un costume de mariage (« Aujourd’hui c’est la seule chose qu’il en reste »), ou encore une boîte de cornichons (« ses préférés »).

Petit frère du musée ouvert en 2006 à Zagreb, en Croatie, ce « Museum of Broken Relationships » s’est installé sur le clinquant Hollywood Boulevard de Los Angeles. | Romain Geoffroy / "Le Monde"

Si l’on peut craindre au premier abord un certain voyeurisme, l’anonymisation des histoires permet de l’éviter. Peu importe l’âge, le sexe, l’origine des amoureux ou la durée de leurs relations, tous ont abandonné un souvenir ici, dans ce hall d’un blanc immaculé à deux pas des étoiles piétinées du Walk of Fame. Il y a cette femme qui portait ce chemisier bleu quand son mari lui a annoncé le divorce après douze ans de mariage, celui qui n’a jamais plus eu de nouvelles après une amourette de vacances, ou ce collègue secrètement amoureux qui n’a jamais franchi le pas… L’exposition ne se cantonne d’ailleurs pas aux relations amoureuses, certaines histoires renvoient à une distance prise avec la religion, à une amitié brisée, ou à un lieu quitté.

Un processus cathartique

Un fer à repasser ayant servi lors d’un ancien mariage. | Romain Geoffroy / "Le Monde"

Tout au long de la visite, devant ces bouts de vies qui nous renvoient parfois à des moments vécus, difficile de ne pas s’interroger : pourquoi ces gens ont pris l’initiative d’exposer leurs anciennes relations ici ? « Ça a bien sûr un côté cathartique pour certaines personnes, estime Alexis Hyde. Mais ce n’est pas nécessairement le cas pour tous, parfois les gens nous ont expliqué qu’ils voulaient juste partager leur histoire parce qu’ils la trouvaient drôle ou originale. »

Drôle, le fait de voir des implants mammaires entreposés sous verre l’est assurément. L’histoire qui l’accompagne et la façon dont elle est contée, est un parfait exemple de tragicomédie :

« Mon ex m’a convaincue de me faire refaire les seins, pas assez gros à son goût. A l’époque, je n’avais pas assez fait de séances chez le psy pour lui dire d’aller se faire foutre, j’ai donc commencé à croire que ma poitrine était insuffisante. […] J’ai eu ces implants pendant cinq ans, avant de décider de les retirer après des complications de santé. […] Une fois enlevés, j’ai un temps pensé à les lui envoyer, que ce serait marrant. Mais finalement cette exposition est une meilleure idée, plus saine. »

Des implants mammaires exposés au Museum of Broken Relationships à Los Angeles. | Romain Geoffroy / "Le Monde"

Pendant six mois, ces moments de vie passée resteront ici, aux yeux de tous les curieux. Après cela, d’autres relations rompues viendront peupler le musée, certains y trouveront peut-être le moyen de se débarrasser enfin d’un douloureux souvenir. Peu importe l’origine géographique, toute personne peut remplir le formulaire de donation d’objet douloureux si elle le souhaite. Cœurs brisés de Pologne, de Norvège, de Californie ou d’Irlande, tous égaux face aux chagrins d’amour ?

Museum of broken relationships, Los Angeles. Entrée : 18 $ (16 €). www.brokenships.la