Sayonara Football, un manga en deux volumes chez Ki-oon. | SAYONARA FOOTBALL © Naoshi Arakawa / Kodansha Ltd.

« Planche à pain », « harpie »... Nozomi Honda supporte au quotidien les remarques sexistes de ses coéquipiers du club de football. Rien n’entame cependant la détermination de cette collégienne de 14 ans, prête à tout pour participer au « tournoi des nouveaux », la compétition inter-établissements. Le problème, c’est que son entraîneur refuse de lui laisser chausser ses crampons... parce qu’elle est une fille. Nozomo redouble donc d’efforts sur le terrain - et d’inventivité au collège - pour le convaincre de changer d’avis.

Dans Sayonara Football, manga en deux tomes, Naoshi Arakawa, parvient à entrecroiser habilement des genres différents : sport, romance, humour... Un exercice d’équilibriste d’autant plus réussi qu’il s’agit de la première série de l’auteur, connu en France pour sa comédie romantique Your lie in April.

On retrouve, dans ces deux oeuvres - parues dans un ordre antéchronologique en France - un « classicisme empreint de modernité » qui a convaincu Ahmed Agne, directeur éditorial chez Ki-oon : « La grande force d’Arakawa, c’est d’utiliser une thématique dans ses histoires, comme la musique classique dans Your lie in April ou le football dans cette série, tout en restant grand public : il n’est pas nécessaire d’être un expert pour les apprécier, elles reposent avant tout sur des relations humaines. »

Un manga né d’un documentaire sur la capitaine de l’équipe de foot japonaise

Naoshi Arakawa est d’ailleurs lui-même loin d’être un féru de football. L’idée de cette série sportive lui est venue en regardant un documentaire sur Homare Sawa, la capitaine de l’équipe féminine nationale : « Arakawa a commencé Sayonara Football en 2009, deux avant que l’équipe féminine japonaise remporte la Coupe du monde. Depuis, il y a eu un boom de la discipline au Japon ! » explique Ahmed Agne.

Nozomi doit aussi s’imposer au sein de l’équipe masculine. | SAYONARA FOOTBALL © Naoshi Arakawa / Kodansha Ltd.

Nozomo, l’héroïne de Sayonara Football, est suffisamment attachante pour passer outre certains clichés : le frêle collégien qui tente de s’affirmer après un long entraînement, un triangle amoureux, le dépassement de soi poussé à l’extrême... On partage d’autant plus facilement la frustration, les espoirs et la colère de Nozomo qu’elle est bien consciente de son désavantage physique, de plus en plus marqué au fil des années face à des camarades masculins qui grandissent plus vite qu’elle. Nozomo est ainsi confrontée à des situations parfois cruelles, notamment lorsque son rival lui déclare, en la toisant : « Je suis un garçon, et c’est suffisant pour être meilleur que toi! »

Ce compte à rebours pernicieux se mêle parfaitement au trait dynamique d’Arakawa, aussi à l’aise dans les séquences de match que dans les passages émotion : l’intrigue suit un rythme soutenu, sans temps mort, et réserve même quelques surprises.

« Pourquoi ne peut-on pas jouer avec les garçons quand on est une fille? »

Ahmed Agne, qui se garde bien de parler au nom de l’auteur, ne conçoit pas pour autant Sayonara Football comme un manga féministe : « A mon sens, le message du manga porte plus sur l’aspect collectif du football, un sport qui repose avant tout sur une pratique commune. L’auteur pose une question : pourquoi ne peut-on pas jouer avec les garçons quand on est une fille ? »

Le directeur éditorial de Ki-oon, conscient que les « mangas de sport ne marchent pas du tout en France », reconnaît que le court format de Sayonara Football l’a incité à lui donner sa chance, tout en alignant la parution de ses deux volumes avec l’Euro 2016.

Au Japon, Naoshi Arakawa s’est quant à lui à nouveau lancé dans une série - longue, cette fois - sur le football cette année. L’histoire d’une lycéenne passionnée de football qui n’a jamais gagné le moindre match... mais qui pourrait bien intéresser les éditions Ki-oon : « Nous n’avons pas encore pu la lire mais si elle n’est pas redondante avec Sayonara Football, nous la sortirons en France ».