Un cabinet américian utilise une IA pour préparer ses dossiers. | Manon Louvard / Le Monde

Le métier d’avocat ne semblait pas le premier menacé par l’intelligence artificielle (IA). Et pourtant, l’un de ces programmes vient de faire son entrée dans un des plus importants cabinets d’avocats américains. BakerHostetler, qui compte pas moins de neuf cents avocats, s’est doté en mai de cet outil, appelé Ross, pour travailler sur les affaires liées à des faillites d’entreprise.

Ross a pour fonction de répondre aux questions que se posent les avocats en allant fouiller dans des milliers de documents juridiques. Selon le site de l’entreprise qui l’a développé, Ross « comprend » les questions qui lui sont posées en langage naturel et cherche la réponse dans cette masse de documents. Contrairement à un moteur de recherche, il ne fournit pas une liste de résultats mais « une réponse très pertinente », promet l’entreprise, qu’il développe avec des arguments fondés sur des extraits de texte et des exemples de cas concrets. Ce programme s’enquiert aussi de l’actualité et signale aux avocats si une décision judiciaire pourrait s’avérer pertinente dans l’affaire sur laquelle ils travaillent. Doté d’un système d’apprentissage, Ross est censé s’améliorer au fil du temps et des requêtes qui lui sont soumises.

L’objectif affiché est de faire gagner du temps à ces entreprises, pour lesquelles ce type de recherches, indispensable, est un travail long, laborieux et donc coûteux… Et souvent confié à des avocats débutants. La question du remplacement des travailleurs par des machines se pose donc encore ici — Ross n’est pas encore prêt à plaider lors d’un procès. Il ne s’agit pour le moment que d’un outil informatique permettant d’assister la cinquantaine d’avocats du service consacré aux faillites.

Une intelligence artificielle dans un conseil d’administration

Ross est basé sur la technologie de Watson, le programme d’intelligence artificielle d’IBM, rendu célèbre en 2011 en battant l’homme au jeu télévisé « Jeopardy! ». Ce n’est pas la première IA à s’inviter dans le monde de l’entreprise. En 2014, la société financière hongkongaise Deep Knowledge avait carrément nommé un programme membre de son conseil d’administration, comptant sur ses conseils en matière d’investissement. Cette année, l’agence de publicité japonaise McCann a quant à elle fait d’une IA sa nouvelle directrice de création, aux côtés d’autres humains occupant le même poste.

D’autres comptent sur l’intelligence artificielle pour s’attaquer à d’autres fonctions encore plus prestigieuses… Comme président des Etats-Unis. C’est en tout cas l’objectif affiché de la campagne Watson 2016, qui veut faire du programme d’IBM le successeur de Barack Obama. Cette campagne est bien évidemment une boutade, mais qui compte ainsi questionner à la fois les compétences des politiques, mais aussi celle de ces programmes de plus en plus performants et la place qu’ils pourraient occuper à l’avenir dans nos vies.