Une vendeuse de tomates sur un marché de Lagos. | PIUS UTOMI EKPEI / AFP

Le lépidoptère, dont les larves attaquent rageusement les feuilles et les fruits du tomatier, s’appelle Tuta absoluta. C’est lui qui provoque une grave pénurie de tomates au Nigeria et met tout le pays en émoi. Cette plante de la famille des solanacées constitue la base de la cuisine nigériane. Or les ravages de la petite bête sont tels qu’ils ont conduit les autorités du Kaduna, un Etat du nord du pays, à déclarer, mardi 24 mai, l’état d’urgence. Six Etats sont touchés dans le pays.

Les prix ont flambé de façon inquiétante. Une caisse d’une centaine de tomates, qui se vendait, avant la catastrophe, entre 300 et 1 500 nairas, en vaut désormais 42 000 (186 euros). La tomate devient un produit de luxe absolument inaccessible pour une population déjà confrontée à une inflation importante et à une hausse constante du prix de l’essence. Le véritable riz jollof, un plat prisé des Nigérians, n’est plus qu’un souvenir. Tout comme l’assaisonnement habituel des soupes de viande ou de poisson séché.

Autour de la ville de Kano, 90 % des 17 000 hectares de cultures de tomates ont été entièrement perdus. Déjà plus de 200 cultivateurs sont sévèrement touchés et leur manque à gagner est estimé à un milliard de nairas par Manzo Daniel, responsable de l’agriculture de l’Etat de Kaduna.  « Pour le moment, c’est juste le début d’un désastre. Mais si nous ne prenons pas des mesures drastiques très vite, le mal risque de se propager à vitesse grand V », a-t-il confié à l’AFP. Des experts ont été envoyés au Kenya, déjà touché par les effets de cet insecte résistant aux pesticides, pour mettre au point une stratégie pertinente pour l’éradiquer.

Importation massive de concentré

L’immense usine de transformation de tomates construite en périphérie de Kano par le groupe Dangote et mise en service au mois de mars a été contrainte de s’arrêter temporairement. Financé à hauteur de 18,4 millions d’euros par Aliko Dangote, l’homme d’affaires le plus fortuné d’Afrique, ce site de production de concentré de tomate devait produire 430 000 tonnes de concentré par an. Soit près de la moitié de la demande annuelle du Nigeria, évaluée à 900 000 tonnes, selon le ministère de l’agriculture.

Faute d’usines locales de transformation, le pays était jusqu’à présent obligé d’importer massivement son concentré de tomate, notamment en provenance de Chine. Il va devoir continuer. L’ouverture de l’usine avait été d’autant plus saluée par les fermiers que la moitié de la production nigériane de tomates pourrissait en raison notamment d’un manque de capacité de stockage. La direction du site s’était engagée à se fournir auprès de 50 000 fermiers.

Avant cette grave pénurie, le Nigeria se classait, avec 1,5 million de tonnes de tomates par an, au 14e rang mondial de la production et au 2e rang en Afrique.