Glasgow, le 23 juin. | JEREMY SUTTON-HIBBERT POUR "LE MONDE"

Le scénario annoncé par les nationalistes écossais s’est réalisé. L’Ecosse a voté largement en faveur du maintien dans l’Union européenné à 62 %, mais « sera tirée en dehors de l’Union européenne par l’Angleterre ». L’ensemble des 32 circonscriptions de la région a choisi le « in », mais les 1,7 millions d’électeurs de la région favorables à l’UE n’ont pas suffi a contrebalancer le vote de l’Angleterre. Ce résultat ouvre une « crise constitutionnelle », a prévenu dans la nuit le chef de file du parti national écossais (SNP)à Westminster, Angus Robertson. La premier ministre de l’Ecosse, Nicola Sturgeon, a prévenu vendredi que l’Ecosse voyait « son avenir au sein de l’Union européenne ».

Dans son programme le SNP, qui reste ultra-majoritaire dans la région même s’il a perdu sa majorité absolue au Parlement ecossais lors des élections régionales début mai, assure qu’il devrait avoir le droit d’organiser un nouveau référendum d’indepéndance « s’il y a un changement significatif par rapport aux circonstances de 2014, telle qu’une Ecosse tirée en dehors de l’Union européenne contre sa volonté ». A l’époque, 55,3 % des Ecossais s’étaient opposés à l’indépendance. Un des principaux arguments des opposants à l’indépendance était justement qu’une sortie du Royaume-Uni aurait automatiquement entraîné une sortie de l’UE. « Je pense que beaucoup de gens qui avaient voté ’non’ vont regarder de très près la situtation », a expliqué une députée SNP sur la BBC.

L’ancien leader du parti, Alex Salmond, qui reste très influent en interne, a été très clair lors d’un débat sur la BBC organisé fin mai, expliquant même que ce référendum pourrait se tenir dans les deux années de négociation prévues pour organiser la sortie du Royaume-Uni de l’UE. Mais Nicola Sturgeon, a, elle, été plus prudente, évoquant plutôt une simple possibilité après avoir été attaquée sur le supposé « double-jeu » du parti.

Faible participation

Sur le terrain, la majorité des électeurs ont toutefois vu avec distance ce référendum, qui s’est tenu dans une ambiance incomparablement plus calme que celle de la consultation sur l’indépendance de 2014. La participation a été beaucoup plus faible qu’en Angleterre. Dans les rues de Glasgow, où elle a été particulièrement faible, aucun électeur expliquait n’avoir fait leur choix en fonction de l’indépendance écossaise et peu croyait à une nouvelle consultation sur l’indépendance. « Si on sort de l’Union européenne, avec toute la douleur que ça va causer, vous pensez vraiment qu’on va encore s’ajouter de la douleur en sortant du Royaume-Uni ? », estimait avant le scrutin Willie Rennie, leader du parti libéral démocrate (pro-UE) en Ecosse.

Rien ne dit par ailleurs que la sortie de l’Union européenne suffise à réellement faire basculer l’opinion écossaise par rapport à 2014. Or « Nicolas Sturgeon est vraiment prudente, elle ne fera un second référendum sur l’indépendance que si elle est sûre de le gagner. Et, quand on regarde les sondages, ce n’est pas certain que ce soit le cas », avertit James Mitchell, spécialiste du SNP à l’université d’Edimbourg.

Signe de cette prudence, Mme Sturgeon avait expliqué au Guardian cette semaine que « ça prend du temps pour légaliser un référendum ». « Mais même si nous ne prenons pas la décision immédiatement, nous devrons faire certaines choses pour garder cette option possible », avait-elle précisé. La question du mandat donné par les électeurs écossais est crucial alors que le SNP a actuellement besoin des Verts écossais pour avoir une majorité absolue au Parlement écossais. Selon M. Mitchell, l’hypothèse la plus probable est que ce nouveau scrutin soit organisé uniquement après le prochain scrutin régional, prévu en 2020, et si le SNP promet alors de manière suffisament claire de forcer la main de Westminster s’il l’emporte.