Laurent Blanc, le 19 avril 2016. | DAMIEN MEYER / AFP

C’est par un communiqué particulièrement sobre que le Paris-Saint-Germain a mis fin à un faux suspense en annonçant, lundi 27 juin, le départ de son entraîneur Laurent Blanc, en poste depuis juin 2013. « Dans un climat serein, les deux parties ont mené des discussions qui ont abouti à la signature d’un protocole d’accord qui préserve les intérêts de chacune d’entre elles. Jean-Louis Gasset, l’entraîneur adjoint, et Philippe Lambert, le préparateur physique, quittent également le club dans le cadre de cet accord à l’amiable », a annoncé le club.

Dans un communiqué transmis à l’Agence France-Presse (AFP), Laurent Blanc a souhaité « bon courage » à son « successeur », qui devrait être l’Espagnol Unai Emery, vainqueur de la Ligue Europa en 2014, 2015 et 2016 avec le FC Séville. Alors qu’il avait prolongé, en février, son contrat jusqu’en 2018, l’ex-sélectionneur des Bleus (2010-2012) devrait toucher, selon L’Equipe, une indemnité de départ de 22 millions d’euros, négociée par son agent, Jean-Pierre Bernès. Le président du PSG, Nasser Al-Khelaïfi, a tenu à « remercier » le Français « pour tout ce qu’il a apporté ces dernières années en termes de jeu et de résultats. »

Avec onze trophées remportés (trois titres de champion de France, trois Coupes de France, trois Coupes de la Ligue et trois trophées des champions), le technicien de 50 ans s’est forgé un palmarès éloquent, transformant le club en une machine à gagner sur la scène hexagonale. Durant son règne, le PSG aura tout raflé en France, réalisant un quadruplé inédit en 2015. Propriété du fonds Qatar Sports Investments (QSI) depuis 2011 et doté d’un budget annuel pharaonique (autour de 500 millions d’euros), le club a notamment écrasé la Ligue 1 cette saison, remportant dès la mi-mars le titre, avec 25 points d’avance sur son dauphin monégasque.

« Je pense que Laurent Blanc a fait un travail fantastique avec le PSG, confiait au Monde, en mai, le buteur suédois Zlatan Ibrahimovic, qui vient de quitter le club. Il a permis à l’équipe de très bien jouer. J’aime beaucoup sa philosophie et sa manière de travailler. Le bilan est très positif. »

Cette razzia et le style de jeu flamboyant et spectaculaire prôné par Blanc n’auront toutefois pas convaincu le Qatari Nasser Al-Khelaïfi. Le 12 avril, le patron du PSG avait pourtant assuré l’entraîneur de son soutien malgré l’élimination (défaite 1-0 au retour après un nul 2-2 à l’aller) de ses joueurs par Manchester City, en quarts de finale de la Ligue des champions. Ce jour-là, le technicien à l’éternelle barbe de trois jours avait joué aux apprentis sorciers : il avait changé son schéma de jeu, tablant sur un 3-5-2 ultra-offensif. Un pari tactique qui n’avait pas été couronné de succès.

Dans ce contexte, les dirigeants de QSI pouvaient-ils tolérer de voir leur formation caler pour la quatrième année consécutive à l’orée du dernier carré de la plus prestigieuse des compétitions européennes ? Et ainsi échouer à égaler la performance réalisée par le club, en 1995, sous l’ère Canal+ ?

Plafond de verre

Incapable de percer le plafond de verre qui circonscrit ses ambitions continentales, Nasser Al-Khelaïfi a eu un échange musclé avec l’émir du Qatar, Tamim ben Hamad Al-Thani, dont le rêve est de décrocher la Ligue des champions avant de voir son pays accueillir la Coupe du monde, en 2022. Le souverain était d’autant plus déçu que le PSG ait échoué dans sa quête du graal européen face aux Citizens, dont le propriétaire est le cheick Mansour bin Zayed Al-Nahyan, demi-frère du président des Emirats arabes unis et patron du fonds Abu Dhabi United Group. Les rivalités régionales qui entouraient ce « Golfico » ont donc pesé dans la balance. Au début de juin, dans un entretien au Parisien, Nasser Al-Khelaïfi avait implicitement annoncé le départ de son entraîneur, appelant à de « gros changements ».

Au total, malgré un ratio impressionnant de 126 victoires, 31 nuls et 16 défaites en 173 rencontres passées sur le banc parisien, Blanc a payé ses trois échecs (contre Chelsea en 2014, le FC Barcelone en 2015, et Manchester City en 2016) en quarts de finale de la Ligue des champions. A la tête d’une escouade de stars chevronnées (Thiago Silva, David Luiz, Thiago Motta, Angel Di Maria), Blanc aura aussi, au fil de ses déclarations publiques, tenté de refréner les ardeurs de ses dirigeants. Il aura ainsi pointé le « retard culturel » du PSG sur ses grands rivaux européens, appelant les médias français à faire preuve de patience.

Laurent Blanc, le 29 septembre 2014. | FRANCK FIFE / AFP

« Le Real Madrid, Barcelone et le Bayern Munich ont une histoire européenne beaucoup plus riche que la nôtre, déclarait Laurent Blanc au Monde, au printemps 2014. Mes dirigeants veulent remporter un jour cette Ligue des champions. Quand  ? Vous ne pouvez pas fixer une date ou une saison précise. Quand vous arrivez une fois en huitièmes de finale, une fois en quarts ou en demies, vous vous rapprochez. »

Sur le plan managérial, Blanc aura donné toute latitude à ses cadres, son capitaine Thiago Silva et Zlatan Ibrahimovic au premier chef. Successeur de l’expérimenté italien Carlo Ancelotti (trois victoires en Ligue des champions à son actif), qui a lui-même mis fin à son aventure parisienne (2012-2013), le « Président » aura agi avec souplesse, peu enclin à mettre en avant son impressionnant CV de joueur (champion du monde 1998 et d’Europe en 2000). En février, il a même dû ravaler sa colère lors de la célèbre « affaire Aurier ». Il avait d’ailleurs accepté de réincorporer le latéral du PSG, coupable d’avoir tenu des propos pas très amicaux envers lui.

Roi de France mais éternel apprenti sur la scène européenne, Blanc laisse derrière lui un PSG repu de titres sur la scène domestique, mais en fin de cycle. Son successeur putatif Unai Emery est prévenu. Il devrait prendre la porte s’il n’atteignait pas, au minimum, les demi-finales de la Ligue des champions la saison prochaine. Le seul objectif qui compte pour les actionnaires qataris.