Chaque phrase, chaque mot, presque chaque virgule, a été pesé. L’Assemblée nationale a adopté, mardi 12 juillet, au cours de la discussion en deuxième lecture du projet de loi justice pour le XXIsiècle, une nouvelle procédure de changement de sexe à l’état civil pour les personnes transgenres. Sans correspondre totalement aux attentes des associations trans, elle s’en est rapprochée. « Le travail n’est pas fini, mais c’est une avancée car la procédure est totalement démédicalisée », commente Clémence Zamora-Cruz, porte-parole de l’Interassociative lesbienne, gay, bi et trans. Aujourd’hui, des certificats de psychiatres, des preuves d’opérations de changement de sexe, voire de stérilisation, sont demandés.

Le texte prévoit que « toute personne qui démontre par une réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe à l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue peut en obtenir la modification ». Une liste indicative de ces faits est précisée, par exemple qu’elle est connue sous le sexe revendiqué par son entourage familial, amical ou professionnel. Le fait d’avoir engagé ou achevé plusieurs traitements médicaux a été retiré de la liste, ce qui constituait l’une des principales revendications des associations. Elles redoutaient que ce critère continue d’être exigé par les tribunaux. La procédure a également été ouverte aux mineurs émancipés.

Les demandes effectuées auprès des tribunaux

Une précédente version du texte, votée par l’Assemblée le 19 mai en première lecture, avait provoqué la colère des associations trans, qui considéraient les règles adoptées trop intrusives et arbitraires, en raison de dispositions votées à l’initiative du gouvernement par voie d’amendements. Lors de cette nouvelle lecture, les députés socialistes Erwann Binet et Pascale Crozon se sont rapprochés de la rédaction initiale de leur amendement, avec le soutien de la commission des lois et son rapporteur (PS) Jean-Yves Le Bouillonnec, contre l’avis du gouvernement.

Ce dernier l’a toutefois emporté sur un point : les demandes seront effectuées auprès des tribunaux, et non des procureurs. « Le débat contradictoire, c’est tout le contraire de l’arbitraire », a affirmé M. Urvoas. Les associations trans réclament de leur côté une déjudiciarisation complète. La députée PS Chaynesse Khirouni et l’écologiste Sergio Coronado ont tenté sans succès de faire adopter un changement de sexe fondé sur une simple déclaration devant l’officier d’état civil. « Cela heurte frontalement le principe de l’indisponibilité de l’état des personnes », a affirmé le garde des sceaux. L’opposition a de son côté condamné « ceux qui veulent faire table rase de tout déterminisme ».