Yohann Diniz, aux Jeux olympiques de Londres, en 2012. | MARTIN BUREAU/AFP

Il avait surtout la tête à l’effort, jeudi midi, à la suite d’une grosse séance de musculation et d’abdominaux. Après quelques tours effectués torse nu sur la piste d’entraînement du lycée climatique de Font-Romeu (Pyrénées-Orientales), le marcheur français Yohann Diniz a tout de même commenté la décision du Tribunal arbitral du sport. La plus haute juridiction sportive a rejeté l’appel des 68 athlètes russes qui contestaient leur suspension par la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF). Une étape supplémentaire qui obscurcit encore davantage leur horizon olympique, à quelques jours des Jeux de Rio (5-21 août). Même si c’est le Comité international olympique (CIO) qui devrait sceller définitivement leur sort.

« C’est logique qu’il n’y ait pas de Russes, car on a pointé du doigt un système étatique, explique Diniz au Monde. Tout le monde le savait depuis des lustres, le rapport [McLaren] ne nous apprend rien de vraiment neuf. Je pense maintenant que c’est à l’IAAF et à toutes les fédérations, ainsi qu’au CIO, d’établir de nouvelles bases pour repartir à zéro avec tous les athlètes russes. Mais cette refondation ne doit pas passer par les institutions russes, parce que l’on sait très bien que l’Etat est derrière. Il faudra que cela vienne de pays extérieurs, je pense. »

« Les athlètes sont aussi victimes du système »

Le triple champion d’Europe ne se réjouit pas pour autant de cette situation. « Je suis content mais déçu pour l’homme en général, explique-t-il. Car c’est un problème humain qui va bien au-delà du sport. Pour moi, les athlètes sont aussi victimes du système. On va chercher des gamins dans leur famille, vers 12-13 ans, on les met dans des centres, et on leur dit : “Tu prends ça.” Et on donne de l’argent à leurs parents. »

Au-delà du cas de l’athlétisme, les autres sportifs russes devraient-ils aussi être exclus à Rio, comme le réclame l’Agence mondiale antidopage ? « Forcément, cette question se pose, puisque le rapport McLaren pointe tous les sports », reconnaît Diniz, sans pour autant avoir un avis totalement tranché sur la question. La décision du TAS laisse la porte ouverte aux autres sportifs russes. Et le CIO semble pour l’instant vouloir laisser la main aux fédérations internationales concernant les questions d’éligibilité aux Jeux. Or l’IAAF a suspendu la fédération russe, mais les autres fédérations internationales ne sont pas dans le même cas.

« Les Américains se foutent un peu du monde »

Le recordman du monde du 50 km marche, qui tentera de gagner sa première médaille olympique le 19 août, à Rio, souligne par ailleurs le fait que le problème du dopage ne concerne pas que les Russes. « Il y a d’autres pays où les contrôles sont difficiles à effectuer, des cliniques ambulantes au milieu de l’Afrique. Il faut mettre un grand coup de pied dans la fourmilière, pas que sur un seul pays. »

Et de conclure, un brin moqueur, en écho à la position des agences antidopage canadienne et américaine, qui avaient demandé l’exclusion des Russes avant même le rapport McLaren : « Les Américains qui gueulent, je trouve qu’ils se foutent un peu du monde. Parce que l’on sait très bien ce qu’il se passe à côté, en NBA [championnat américain de basket-ball], NFL [football américain], NHL [hockey], mais aussi en athlétisme, en cyclisme. Ils en ont eu de bons aussi [de scandales de dopage]. »