LA LISTE DE NOS ENVIES

Cette semaine dans la sélection replay, un autoportrait singulier de Marguerite Duras, une redécouverte d’Antoine Blondin, l’autre légende du Tour, et un flash-back sur les Etats-Unis aux premiers temps du sida.

Duras par Duras

Marguerite Duras - ARTE (documentaire de Pierre Assouline)
Durée : 00:58

Quelle meilleure introduction à l’œuvre de Marguerite Duras que ce documentaire de Pierre Assouline. Il trace un « autoportrait » singulier, composé de montages d’archives sonores et photographiques aussi émouvants qu’attachants, tenus par le fil d’une voix au phrasé empli d’élans et de tranchants aphoristiques, mais aussi de doutes, de silences – ceux de l’écriture.

Une voix aux tonalités multiples, comme son œuvre, qui raconte son enfance (Marie Duras est née Donnadieu en 1914) dans l’Indochine coloniale, la misère des indigènes et celle d’une famille de petits Blancs, son éveil à l’injustice, sous les cris d’une mère seule, harassée d’indignation et de désespoir. Une mère dont elle se sépare en 1931 pour poursuivre ses études à Paris. Avant de rencontrer Robert Antelme, son mari, avec lequel elle s’engage dans la guerre, la Résistance.

Après la traversée de ces « sales années », marquée par l’attente du retour de déportation de Robert Antelme relatée dans La Douleur (POL, 1985) viendra le temps de la « folie communiste », sept longues années d’aveuglement et de mépris, avant la rupture.

Au fil de cette traversée du siècle – sur lequel Duras pose un regard lucide et visionnaire –, les combats pour l’indépendance de l’Algérie, l’effervescence joyeuse de Mai-68 s’entremêlent avec d’autres combats, douloureusement intimes, dans l’alcool et la solitude de l’écriture. Une « folie », une « sauvagerie d’avant la vie » sur lesquelles elle s’ouvre, à mots comptés et poignants. Christine Rousseau

« Le Siècle de Duras », de Pierre Assouline (France, 2013, 55 minutes). A revoir sur Arte + 7 jusqu’au 28 juillet.

Blondin, à l’encre jaune

Antoine Blondin et le Tour de France
Durée : 07:03

Antoine Blondin aura conté avec finesse et fantaisie le Tour de France et ses grands épisodes qui ont traversé le temps, ses intrigues faites de poussière, de sang, d’os brisés, de sourires, de rancœurs… Vivre trois semaines avec la Grande Boucle était un rêve de gosse pour ce romancier distingué en 1949 pour son livre L’Europe buissonnière.

Un rêve qui se réalise en 1954, lorsque le quotidien sportif L’Equipe convie l’écrivain, alors âgé de 32 ans, sur quatre étapes disputées dans le Sud-Ouest pour rédiger des chroniques. Par la suite, il couvrira l’épreuve dans son intégralité jusqu’en 1982 : l’auteur d’Un singe en hiver n’en manquera qu’un seul, en 1958, rédigeant en tout 524 chroniques, dans lesquelles il exercera « son droit de vélo », louera le « Mao jaune » d’Eddy Merckx, ou fustigera « la vox popoulidor » (les partisans de Raymond Poulidor)…

A travers les témoignages d’anciens coureurs et de journalistes qui ont bien connu le romancier, le film de Christophe Duchiron dresse le portrait d’un suiveur pas comme les autres, qui a consacré sa plume lumineuse et son existence à la plus incroyable des courses cyclistes. Blondin ne pouvait écrire sans boire une goutte d’alcool et pas que. Un jour, pris par l’angoisse de la page blanche, il avait absorbé le liquide noirâtre d’un encrier : « Comme cela, je suis sûr de pisser la copie. » Antoine Blondin aimait le Tour de France, et le Tour de France aime encore Antoine Blondin. Mustapha Kessous

« Antoine Blondin, la légende du Tour », de Christophe Duchiron (France, 2016, 55 minutes). A revoir sur Pluzz jusqu’au mardi 26 juillet.

« The Normal Heart », aux premiers temps du sida

THE NORMAL HEART Bande Annonce
Durée : 00:47

The Normal Heart, téléfilm de Ryan Murphy – créateur, entre autres, des séries « Nip/Tuck », « Glee », « American Horror Story » et réalisateur de Eat Pray Love (2010) – raconte l’épouvantable période au cours de laquelle ce qu’on appela très vite le « cancer gay » frappa la communauté homosexuelle nord-américaine avant de se propager ailleurs dans le monde.

Au tout début des années 1980, on ne savait encore presque rien du sida, de sa transmission et de son virus. On est transporté à cette époque cruciale à travers le portrait d’un activiste au courage inépuisable – joué par Mark Ruffalo –, qui mène de front le combat contre un pouvoir politique insensible et la bataille pour la survie de son compagnon agonisant.

Julia Roberts incarne une chercheuse en médecine atteinte de la polio. Elle devine très vite ce qui se passe et tente – dans l’indifférence puis face à l’hostilité –, de faire comprendre aux homosexuels ce qui est en train de décimer leurs rangs, alors que la libération des mœurs accroît par ailleurs leur visibilité. Le film, cru, dur mais juste, rappellera de terribles souvenirs à ceux qui ont vécu ces moments dans la « vraie » vie. Car le sujet de cette fiction télévisée fut, et reste, une terrible réalité. Renaud Machart

« The Normal Heart », de Ryan Murphy (Etats-Unis, 2014, 2 h 12). Avec Mark Ruffalo, Julia Roberts, Matthew Bomer, Jim Parsons, Alfred Molina, Taylor Kitsch. Canal + à la demande (jusqu’au 23 août).