Lieu d’implantation prévu des réacteurs du projet de centrale à Hinkley Point. | JUSTIN TALLIS / AFP

Trois jours avant le conseil d’administration (CA) qui doit donner le feu vert à la construction par EDF de deux réacteurs EPR à Hinkley Point, en Grande-Bretagne, le comité central d’entreprise (CCE) d’EDF a échoué, lundi 25 juillet, à faire aboutir une action en justice visant à empêcher que ce point ne soit mis à l’ordre du jour de la réunion. La décision d’investissement finale sur ce projet controversé de 18 milliards de livres (21,6 milliards d’euros), à l’origine de fortes tensions au sein de l’entreprise, doit être rendue jeudi.

Le CCE d’EDF a demandé vendredi à la justice le retrait du dossier Hinkley Point de l’ordre du jour du conseil. Cette demande sera examinée le 2 août au tribunal de grande instance de Paris, a indiqué le secrétaire du CCE, Jean-Luc Magnaval. Compte tenu de la date de l’audience, fixée lundi prochain, le dossier contesté pourra donc figurer à l’ordre du jour du CA, comme prévu. Mais le CCE ayant aussi demandé à la justice d’ordonner « la suspension de tous les effets des délibérations qui seraient prises par le conseil » ce jour-là, un avis du conseil d’administration en faveur de ce chantier pourrait ne pas valoir lancement effectif du projet.

Pour le CCE, avec ce référé, il s’agissait de défendre « l’accès au juge » de l’instance, EDF ayant décidé de soumettre ce projet au vote des administrateurs sans attendre le résultat, le 22 septembre, d’une action en référé du CCE pour obtenir des informations supplémentaires sur le projet britannique.

Interrogé par l’AFP, EDF n’a pas fait de commentaires. L’électricien a annoncé jeudi dernier dans la soirée qu’il avait convoqué un conseil d’administration le 28 juillet pour prendre une décision finale d’investissement sur ce projet gigantesque, à l’origine de fortes tensions au sein de l’entreprise.

Cette ultime étape se faisait attendre depuis la signature, en octobre 2015, d’un accord commercial avec l’entreprise publique chinoise CGN, qui devrait apporter un tiers du financement. Les fédérations de l’énergie CGT, CFE-CGC et FO, qui demandent son report depuis plusieurs mois, ont accusé vendredi le président François Hollande d’être « passé outre l’avis des salariés » sur ce chantier. Elles ont évoqué une « violation » du CCE d’EDF avec une prise de décision avant même l’audience prévue le 22 septembre.

Incertitude financière

Par ailleurs, l’association EDF Actionnariat salarié (EAS) a redit, par communiqué, son opposition au projet d’investissement qui serait, selon elle, « de nature à compromettre gravement la viabilité d’EDF et les intérêts de ses actionnaires salariés ». En avril, l’association avait déjà fait valoir que le projet Hinkley Point « pourrait obérer l’avenir de l’entreprise et les investissements nécessaires tant à la transition énergétique qu’à la maintenance du parc nucléaire » français exploité par EDF.

Les syndicats et certains cadres du groupe, y compris à des niveaux élevés, jugent l’entreprise incapable de mener à bien ce projet, financièrement et industriellement, alors qu’aucun EPR n’est encore en état de marche et que les déboires de ceux de Flamanville, en France, et d’Olkiluoto, en Finlande, font craindre de nouveaux dérapages de coûts.

Le dossier d’Hinkley Point est l’un des points qui ont justifié les perquisitions menées par l’Autorité des marchés financiers au siège d’EDF jeudi. Le gendarme des marchés financiers cherche à savoir si le groupe a informé les investisseurs de façon complète, en temps et en heure, sur ce sujet susceptible d’affecter le cours de son action en Bourse.