Le secrétaire général du Conseil européen Thorbjorn Jagland et le ministre turc des affaires étrangères Mevlut Cavusoglu le 3 août. | ADEM ALTAN / AFP

Rompre les négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne serait un « grave erreur de politique étrangère », a jugé le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, à la télévision allemande après un appel en ce sens de l’Autriche.

« En ce moment, si l’on donnait l’impression à la Turquie que, quelle que soit la situation, l’Union européenne n’est pas prête à l’accepter en son sein, ce serait selon moi une grave erreur de politique étrangère », a-t-il dit à la chaîne ARD dans un entretien qui doit être diffusé dimanche et dont des extraits ont été publiés dès jeudi 4 août.

Plus tôt dans la journée, l’Autriche avait déclaré que l’Union européenne devrait mettre un terme aux négociations d’adhésion de la Turquie, qui ne sont plus qu’une « fiction » en l’état actuel des choses. « Les normes démocratiques turques sont loin d’être suffisantes pour justifier son adhésion », a également dit le chancelier autrichien, Christian Kern, aux médias autrichiens, avant de réclamer un débat sur le sujet lors du Conseil européen prévu le 16 septembre.

Passe difficile

Le processus d’adhésion de la Turquie à l’UE traverse une passe particulièrement difficile depuis que le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a suggéré de rétablir la peine de mort dans le cadre de la répression du putsch raté du 15 juillet.

Le ministre des affaires européennes turc, Omer Celik, a rapidement réagi, qualifiant d’« extrêmement perturbantes » les déclarations de M. Kern. « La critique est un droit démocratique, mais il doit y avoir une différence entre critiquer la Turquie et adopter une attitude antiturque », a-t-il dit devant la presse à Ankara.

A la fin de juillet, le président Erdogan avait invité l’Union européenne et les Etats-Unis à « se mêler de leurs affaires », en réponse aux critiques des Occidentaux concernant la vaste purge menée après le coup d’Etat manqué.

Dans une interview publiée jeudi par l’agence autrichienne APA, le ministre de la défense autrichien, Hans-Peter Doskozil, est allé plus loin que le chancelier, comparant le régime turc actuel à une « dictature » : « Le temps est venu (…) de dire clairement que les négociations avec la Turquie doivent être suspendues ou s’arrêter. »

L’accord sur les migrants affecté

La Turquie « reste un partenaire important dans les questions de sécurité et d’intégration », a toutefois estimé Christian Kern, soulignant le rôle clé de la Turquie dans la crise des migrants.

En mars, La Turquie et l’UE ont signé un pacte visant à tarir les traversées de migrants des côtes turques vers les îles grecques et donc l’Union européenne. Il permet le renvoi en Turquie de migrants en échange de contreparties politiques et financières, dont l’accélération des négociations d’adhésion.