L’affaire de l’enfant bloqué en Arménie continue de faire débat. Selon les autorités arméniennes, Mme A., une Française d’une quarantaine d’années, est mère d’un bébé d’un peu plus d’un mois. Mais le consulat de France à Erevan a refusé un laissez-passer à son fils depuis le début de juillet, car il suspecte l’enfant d’être né par gestation pour autrui (GPA), une pratique interdite en France, en raison de l’absence de mention du père dans l’acte de naissance.

Mme A. a fait valoir son statut de mère sur l’acte de naissance apostillé (c’est-à-dire authentifié) par les autorités arméniennes, afin d’être conforme au droit français. Elle a aussi plaidé l’urgence de l’obtention d’un laissez-passer pour le bébé, puisqu’elle devait rentrer en France pour des raisons professionnelles.

Après avoir été condamné devant le tribunal administratif de Paris le 26 juillet, le ministère des affaires étrangères a fait appel de la décision. Le Conseil d’Etat lui a ordonné, mercredi 3 août, de délivrer un laissez-passer à l’enfant et de dédommager la plaignante de 3 000 euros de frais d’avocat.

Le ministère se conformera à la décision du Conseil d’Etat, qui permet de solidifier la jurisprudence en matière de droit de la filiation. « C’est une situation inédite que l’acte de filiation ne comporte pas de père. Nous avions besoin d’une décision du Conseil d’Etat qui puisse faire jurisprudence. Nos services n’ont pas de position idéologique concernant le retour en France des enfants nés par GPA, mais nous avons besoin d’instructions juridiques, une ligne de conduite », expliquait une source ministérielle proche du dossier, vendredi 5 août. Elle rappelle que la décision du Conseil d’Etat n’est pas une reconnaissance de la nationalité française de l’enfant.

Faux débat

Une explication que Me Caroline Mécary, l’avocate de Mme A., ne veut pas entendre. Selon l’avocate, le débat ne se situe pas sur l’utilisation ou non de la GPA. Ce qu’a confirmé le Conseil d’Etat, qui écrit dans son ordonnance de décision que « la circonstance de conception de cet enfant (…) serait, à la supposer établie, sans incidence sur l’obligation (…) d’accorder une attention primordiale à l’intérêt supérieur des enfants ». Un acte de naissance étranger, s’il est apostillé, est reconnu par la France.

L’avocate s’appuie sur la circulaire Taubira du 25 janvier 2015, selon laquelle « le seul soupçon du recours à une telle convention [le contrat passé avec une mère porteuse] conclue à l’étranger ne peut suffire à opposer un refus aux demandes de certificat de nationalité française ». Pour Me Mécary, « il n’y a pas de vide juridique, le ministère des affaires étrangères est au mieux incompétent, au pire dogmatique ». Elle ajoute qu’une fois la filiation de l’enfant reconnue par les autorités françaises, il pourra effectuer les démarches pour obtenir la nationalité française.