A l’appel de groupes d’opposition Oromo et Amhara, les deux principales ethnies du pays qui regroupent près de deux tiers de la population éthiopienne, des dizaines de manifestations antigouvernementales ont eu lieu ce week-end dans les deux régions, à l’ouest et au nord de l’Ethiopie.

« Selon nos informations, entre 48 et 50 manifestants ont été tués dans la région Oromo », a déclaré à l’AFP Merera Gudina, figure de l’opposition éthiopienne et président du Congrès du Peuple Oromo. Une source diplomatique a pour sa part rapporté un bilan provisoire de 49 morts pour les deux régions, Oromo et Amhara. Massivement présente, la police a rapidement encerclé les manifestants. Des dizaines d’entre eux ont été arrêtés et certains roués de coup, puis emmenés dans des pick-ups. Certains d’entre eux avaient le visage ensanglanté.

A Addis Abeba, environ 500 manifestants s’étaient rassemblés samedi matin sur la principale place de la capitale, Meskel Square, scandant des slogans tels que « nous voulons notre liberté » et « libérez nos prisonniers politiques ».

Vendredi, le Premier ministre éthiopien Haile Mariam Dessalegn avait annoncé l’interdiction des manifestations « qui menacent l’unité du pays » et avoir autorisé la police à utiliser tous les moyens nécessaires pour les empêcher.

Plus que par son ampleur, la manifestation de samedi est significative car elle est la première à Addis Abeba depuis le début d’une vague de protestations de la part des Oromo et des Amhara, qui pour la première fois manifestaient ensemble contre le gouvernement.

Ces manifestations témoignent d’un ressentiment grandissant de ces deux groupes, qui estiment être discriminés en faveur des Tigréens, accusés d’occuper les postes-clés au sein du gouvernement et des forces de sécurité.

Le rassemblement le plus important de ces dernières semaines avait mobilisé des dizaines de milliers de personnes le 31 juillet à Gondar, une région Amhara du nord du pays.

Samedi, des sources locales ont rapporté à l’AFP des rassemblements et des heurts avec la police dans les villes de Ambo (centre) et Nemekte (ouest), en région Oromo, tandis que des appels à manifester avaient été lancés dans la ville Baher Dar (nord-ouest), en région Amhara.

Mais les autorités bloquent depuis vendredi soir l’accès aux réseaux sociaux, moyen de communication privilégié des activistes. Samedi après-midi, l’accès à internet était quasi impossible à Addis Abeba, selon un journaliste de l’AFP présent sur place.

Les protestations ont débuté il y a plusieurs mois en région Oromo et ont gagné il y a quelques semaines la région Amhara.

Entre novembre et mars, des manifestations Oromo contre un projet d’appropriation de terres avaient fait plusieurs centaines de morts, selon des organisations de défense des droits de l’Homme.

A Gondar, où les Amhara protestent contre la décision du gouvernement éthiopien de rattacher le district de Wolkait à la région voisine du Tigré, les manifestations ont déjà fait au moins une douzaine de morts dans des heurts avec la police, selon les autorités éthiopiennes.