La Zambie vote jeudi pour choisir son président dans un scrutin qui s’annonce très serré entre le sortant Edgar Lungu, élu l’an dernier, et son rival Hakainde Hichilema après une campagne électorale émaillée d’incidents.

M. Lungu, 59 ans, a été élu président de la Zambie en janvier 2015 pour achever le mandat de son prédécesseur Michael Sata, décédé brutalement en octobre 2014.

Il avait battu d’une très courte majorité - moins de 28.000 voix d’écart, soit 1,5 % - son rival Hakainde Hichilema qui avait qualifié le scrutin de « simulacre » et qui se présente jeudi pour la cinquième fois à la présidentielle.

Les supporters du parti de M. Lungu, le Front patriotique (PF), et ceux du Parti uni pour le développement national (UPND) de M. Hichilema se sont violemment affrontés ces dernières semaines, conduisant même à une suspension de la campagne dans la capitale Lusaka le mois dernier.

Pendant cette campagne, le candidat Lungu a montré un visage plutôt radical, menaçant ses opposants à plusieurs reprises. « S’ils me mettent au pied du mur, je suis prêt à sacrifier la démocratie pour la paix », a-t-il lancé lors d’un récent meeting dans la province minière du Copperbelt (centre), une région décisive pour l’élection. « S’il faut prendre des mesures draconiennes, je les prendrai », a-t-il ajouté.

Lungu accusé de museler l’opposition

Alors que l’élection s’annonce plus serrée que jamais, Edgar Lungu a été accusé de tenter de s’en prendre à l’opposition. Un militant de l’opposition a été tué par la police en juin, en marge d’un rassemblement de l’UPND dont le vice-président Geoffrey Mwamba a été arrêté à deux reprises cette année pour avoir « diffamé » M. Lungu.

La maison de M. Mwamba a été perquisitionnée par la police après que des supporters de l’opposition eurent été accusés de vandaliser des affiches électorales du président.

En juin, le Post, le principal quotidien indépendant du pays a été fermé, accusé par les autorités de devoir près de 5 millions de dollars au fisc.

« Cette fois, c’est une élection pour un mandat complet, donc il y a plus d’enjeu (qu’en 2015). Il y a un risque élevé de violences et de contestation après le scrutin surtout s’il est serré », craint Sabine Machenheimer, une spécialiste de la Zambie pour Jane’s, un groupe d’analyse en défense et sécurité. Le vainqueur de l’élection sera élu pour un mandat de cinq ans. Si aucun des deux candidats n’obtient 50 % des voix, un second tour sera organisé.

« La Zambie est relativement stable mais l’éventualité d’un deuxième tour prolonge le risque d’incidents violents », précise-t-elle auprès de l’AFP

Ralentissement économique

La Zambie, ultra-dépendante du cuivre dont elle est le deuxième producteur d’Afrique après son voisin de la République démocratique du Congo, a enregistré une croissance 3,6 % l’an dernier, la plus faible depuis 1998.

La récente chute du prix de cuivre a placé l’économie zambienne « sous intense pression », selon le Fonds monétaire international, et empêche le pays de renouer avec les taux de croissance supérieurs à 10 % qu’il a connus autour de 2010.

Des milliers d’emplois ont été supprimés dans le secteur minier, l’inflation dépasse les 20 %, le déficit 8 % du PIB et la sécheresse perturbe la production hydroélectrique. L’an dernier, le président Lungu a même organisé une prière dans un stade, implorant un redressement de l’économie.

Son opposant, Hakainde Hichilema, un économiste de 54 ans qui a étudié en Grande-Bretagne et fait fortune grâce à des investissements dans l’immobilier et la santé en Zambie, a mis en avant son expérience dans le domaine des affaires, au cours de la campagne.

« Promettre ne suffit pas et mon équipe a de l’expérience et des résultats », a-t-il déclaré dans un meeting. « Nous devons stopper la corruption et les politiques inconsistantes qui pénalisent l’investissement. Nous allons redresser l’économie », a poursuivi celui qu’on surnomme « HH ».

Selon la Banque mondiale, près de 60 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté en Zambie. « Est-ce que les gens vont pouvoir envoyer leurs enfants à l’école ? Leurs vies vont-elles s’améliorer ? C’est l’enjeu de cette élection », affirme l’analyste économique indépendant Mambo Hamaundu.

La Zambie, ex-Rhodésie du Nord, est indépendante de la Grande-Bretagne depuis 1964 et a été dirigée jusqu’en 1991 sous un régime du parti unique par Kenneth Kaunda, avant de s’ouvrir au multipartisme.