Sergueï Ivanov (à droite) avec Vladimir Poutine, au Kremlin, le 12 août 2016. | ALEXEI DRUZHININ / AFP

Plus personne n’est intouchable autour de Vladimir Poutine, même dans son cercle d’anciens KGBistes pétersbourgeois. Vendredi 12 juillet, le président russe a démis de ses fonctions le puissant chef de l’administration présidentielle. Sergueï Ivanov, 63 ans, est la deuxième personnalité politique la plus influente dans le pays après M. Poutine, selon le classement de Nezavissimaïa Gazeta. Il devient représentant spécial du président pour les questions liées à l’environnement et aux transports. Son remplaçant – et jusqu’ici adjoint – Anton Vaïno est un bureaucrate de 44 ans, réputé discret.

Les raisons de cette éviction surprise restent floues. Officiellement, M. Ivanov part de sa propre initiative : « Je me souviens bien de notre accord, du fait que vous m’avez demandé de ne pas vous employer plus de quatre ans comme chef de l’administration présidentielle », a déclaré M. Poutine. Des sources au Kremlin évoquent son état de santé, dégradé depuis la mort de son fils aîné en 2014, qui l’a rendu beaucoup moins actif au travail.

Mais pour certains experts, c’est un signe clair, dans la ligne des remaniements massifs de ces derniers mois : la loyauté personnelle, voire la dépendance envers le chef de l’Etat, compte désormais davantage que le chemin parcouru ensemble. Vladimir Poutine nomme gouverneurs ses gardes du corps, et chef de l’administration présidentielle l’ancien responsable de son emploi du temps. « Poutine a moins envie de se sentir l’obligé de quelqu’un », analyse Andreï Pertsev, du centre de recherches Carnegie. La stratégie change en vue des législatives en septembre et surtout de l’élection présidentielle prévue en 2018.

Né à Tallin dans une famille d’apparatchiks, Anton Vaïno a été préféré au brillant premier adjoint de M. Ivanov, Vyacheslav Volodin. Celui-ci aurait pour défaut, aux yeux du chef de l’Etat, d’afficher des ambitions personnelles. Essentiellement administrateur, Anton Vaïno se situerait à équidistance de la politique pure et des forces de sécurité. « Il n’est pas lié aux clans ni aux groupes de la nomenclatura, affirme le directeur du Centre de la conjoncture politique, Alexeï Chesnakov, dans le quotidien Vedomosti. Soigné et accommodant, mais dur en ce qui concerne la défense des intérêts de Poutine. » Le président russe continue à renforcer son contrôle des structures du pouvoir.

Par Jeanne Cavelier