Mo Farah. | LUCY NICHOLSON / REUTERS

Deux heures avant la finale du 10 000 m masculin, l’introduction était déjà quasiment prête :

« Voilà presque cinq ans que ça dure. Cinq ans que l’arrivée des courses de demi-fond long masculin livrent le même spectacle sur la ligne d’arrivée. On y voit Mo Farah la franchir en premier. Le Britannique dessine ensuite un cœur avec ses bras au-dessus de son crâne lisse. Tout sourire. La finale olympique du 10 000 m des Jeux de Rio n’a pas dérogé à la règle, avec une nouvelle victoire de Farah, devant X et XX. »

Tout journaliste couvrant un événement sportif et un minimum prévoyant prépare toujours quelques lignes, avant même la fin de la compétition, afin d’alimenter au plus vite les sites Internet, amateurs de réactivité. Certaines disciplines rendent l’exercice hautement périlleux. Ce n’est pas le cas du 10 000 m masculin ces temps-ci. Sans leur manquer de respect, il est donc possible de garder cette accroche d’article et en remplacer X et XX par le Kenyan Paul Tanui et l’Ethiopien Tamirat Tola, respectivement médailles d’argent et de bronze derrière « vous savez-qui ».

Invaincu en grands championnats depuis une médaille d’argent au 10 000 m des Mondiaux de Daegu, en 2011, Mo Farah poursuit ainsi sa série d’invincibilité. Sur la piste bleue du stade Engenhao, loin d’être rempli mais très bruyant, il s’est imposé au terme d’une course maîtrisée, en 27 m 5 s 17. Tranquillement, le Britannique s’est d’abord installé… en queue du peloton de 34 coureurs lors des premiers tours de piste. Idéal pour éviter tout risque de chute, alors que l’allure n’était pas folle. Puis il a peu à peu remonté le groupe, au bout de deux kilomètres de course. Avec un passage en 13 m 53 s 11 à mi-parcours, la course se durcissait ensuite quand les Kenyans, puis les Ethiopiens décidèrent d’accélérer le rythme. Mais rien n’y fit et Mo Farah a placé sa traditionnelle accélération dans les 200 derniers mètres.

A 33 ans, le Britannique a tout gagné, et en plusieurs exemplaires. Quintuple champion du monde, il est désormais triple médaille d’or olympique, après son doublé aux Jeux de Londres, en 2012 (5 000 m et 10 000 m). Il est loin le temps où « Fly Mo » échouait à se qualifier pour la finale du 5 000 m, lors des JO de Pékin, en 2008.

Il faut dire que depuis 2008, le natif de Mogadiscio, arrivé au Royaume-Uni à l’âge de 8 ans, n’est plus le même athlète. Il a rejoint le groupe d’entraînement d’Alberto Salazar, aux Etats-Unis, en 2011. Et c’est avec l’entraîneur américain qu’il a entamé sa moisson d’or. Avec les récompenses sont arrivés les soupçons, surtout que le coach a été la cible d’une enquête de l’agence antidopage américaine. Mais cela n’a jamais semblé perturber Mo Farah au moment de s’élancer lors de ses finales. « Je n’aurai jamais autant de pression que pour les Jeux de Londres, où toute une nation m’attendait », expliquait-il lors des Mondiaux de Pékin, en 2015.

Engagé pour disputer les séries du 5 000 m, mercredi 17 août, Mo Farah devrait avoir l’occasion de rééditer, trois jours plus tard, samedi, son doublé réalisé à domicile. L’attaque du compte-rendu de sa future finale est déjà prête.